Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Nous avons une responsabilité ! Nous avons la responsabilité d’assurer à tous les Neuchâtelois des soins hospitaliers de qualité, accessibles à tous et à un prix correct. C’est notre but et c’est dans ce sens que le Conseil d’Etat a travaillé depuis quatre ans. Nous avons construit ensemble un consensus, grâce aux états généraux de la santé, puis au Groupe de pilotage politique, qui réunissait des représentants des villes, des partis, des comités d’initiative et du Conseil d’Etat. Nous avons alors adopté un certain nombre de principes à l’unanimité. C’est sur cette base que le Conseil d’Etat a élaboré ses 17 options stratégiques pour Hôpital Neuchâtelois.
Des soins de qualité, cela signifie que l’on ne conserve dans le canton que les opérations pour lesquelles nous atteignons la taille critique. HNE n’est pas un hôpital universitaire et ne le sera jamais. En conséquence, 20% des patients neuchâtelois sont directement acheminés à Berne et à Lausanne. La qualité, cela veut aussi dire que nous créons sur chacun de nos sites des pôles de compétences dans les différentes spécialités que nous offrons. C’est ainsi que nous avons créé en 2010 le Centre femme-mère-enfant à Neuchâtel et que nous vous proposons de continuer ce mouvement en créant maintenant des centres de compétences en chirurgie ambulatoire et en orthopédie-traumatologie à Neuchâtel et en chirurgie stationnaire à La Chaux-de-Fonds. Ces centres de compétences doivent permettre une meilleure organisation de chacun de ces secteurs et par conséquent, l’amélioration de la prise en charge. C’est particulièrement vrai pour la chirurgie ambulatoire, qui profite grandement d’avoir un parcours qui lui soit réservé au sein de l’hôpital ou de l’orthopédie-traumatologie, qui profitera des synergies entre les médecins de ces deux activités voisines.
L’accessibilité est aussi un élément important. L’hôpital doit être accessible à tous les Neuchâtelois et Neuchâteloises qui en ont besoin aussi facilement que possible. Dans l’accessibilité, il faut ranger d’une part la proximité. Sachant que les familles neuchâteloises ne sont pas très riche, et que les jeunes et les personnes âgées ne sont souvent pas motorisées, si une personne doit débourser 200.- de taxi pour aller aux urgences à Neuchâtel et retour, en particulier, parce que c’est là que peuvent se décider la vie et la mort, elle hésitera à le faire. C’est le début de la médecine à deux vitesses. Ceux qui en ont les moyens prennent le taxi et descendent. Ceux qui n’en ont pas les moyens renoncent, au risque de mettre leur santé en danger. Dans l’accessibilité, il y a aussi d’autre part le climat : suite à un hiver aussi rude que celui que nous venons de vivre, je peux témoigner qu’il n’a pas toujours été facile de prendre sa voiture au petit matin pour rejoindre Neuchâtel. Combien hésiteront à le faire et mettront leur santé en danger ?
Le troisième élément que j’ai évoqué, c’est le coût. Evidemment, les coûts hospitaliers augmentent régulièrement de 3 ou 4% par année. Nous avons fait un effort énorme pour freiner cette augmentation dans notre canton et nous y sommes parvenus. L’hôpital neuchâtelois est probablement celui dont les coûts ont été les mieux maîtrisés en Suisse ces dernières années. Cela s’est d’ailleurs vu dans les primes de l’assurance maladie. Les primes neuchâteloises n’ont que très peu augmenté ces dernières années, de telle sorte qu’aujourd’hui la prime adulte est à peine supérieure à la moyenne suisse et la prime enfant est inférieure à la moyenne suisse. C’est un beau succès, mais ça a été aussi un très gros effort : nous avons demandé 15 millions d’économie à HNE en trois ans. Il y est parvenu en 2011 et 2012. Nous espérons bien sûr qu’il y parvienne aussi en 2013. La maîtrise des coûts de l’hôpital passe premièrement par un contrôle sévère des engagements et du personnel, qui représente 70 à 80% des coûts et par une organisation aussi efficiente que possible. L’efficience, c’est aussi l’utilisation aussi rationnelle que possible des surfaces que nous avons à disposition sur nos deux sites de soins aigus. Il n’est pas rationnel de louer des surfaces à l’extérieur du bâtiment à Neuchâtel quand nous avons deux étages vides à La Chaux-de-Fonds. Il n’est pas rationnel de devoir envoyer les patients qui arrivent en ambulance à Pourtalès à La Chaux-de-Fonds, parce que le site du littoral est complet.
C’est justement cette efficience que nous avons recherchée tout au long de nos réflexions sur l’organisation de l’hôpital et nous avons aujourd’hui la conviction que l’organisation que nous vous proposons répond à ces trois préoccupations de qualité, d’accessibilité et d’efficience.
Certes, on pourrait aussi organiser l’hôpital autrement. Néanmoins, la vision que nous vous proposons est celle qui assure le mieux le service à la population de l’ensemble du canton, mais aussi la pérennité et l’attractivité d’HNE pour les 5 à 10 ans à venir.
Il ne faut en effet pas oublier que depuis le 1er janvier 2012, nos hôpitaux sont en concurrence avec les cliniques privées. Nous avons déjà eu l’occasion de l’évoquer dans cet hémicycle. Cela veut dire que si l’on affaiblit un de nos sites, ce sont les cliniques privées qui vont récupérer les patients. Je suis certaine que nous voulons un hôpital public fort, que nous ne voulons pas d’une médecine à deux vitesses et que par conséquent, nous devons nous assurer que l’hôpital public reste concurrentiel, par rapport aux cliniques privées qui sont dans notre canton. Puis-je vous rappeler que pendant qu’HNE tergiverse concernant la rénovation de La Chaux-de-Fonds et ne rénove pas ses blocs opératoires, la clinique de Montbrillant en a inauguré trois, modernes et magnifiques, l’année passée ? C’est là qu’est la concurrence. Et si on sait que la première motivation des patients, c’est la proximité, ne faisons pas tout pour couper les ailes d’HNE dans le haut.
Lors des débats du mois d’avril 2012 sur les options stratégiques d’Hôpital neuchâtelois à horizon 2017, le Conseil d’Etat avait indiqué que le rôle du politique dans ce dossier était de définir la stratégie hospitalière et qu’il revenait à HNE de mettre en oeuvre les décisions prises. Il estimait disposer de suffisamment de données chiffrées pour pouvoir évaluer dans les grandes lignes les conséquences des options stratégiques retenues, l’analyse fine appartenant à HNE.
Le Grand Conseil a désiré avoir des indications plus précises et a dès lors sollicité du Conseil d’Etat qu’il réalise des analyses complémentaires.
Les chiffres fournis par le mandataire de l’Etat font apparaître clairement que la proposition de répartition des missions du Conseil d’Etat est réalisable et économiquement raisonnable. Elle n’entraîne pas de coûts de fonctionnement supplémentaires par rapport à la situation qui a cours aujourd’hui, mais aussi et surtout par rapport au scénario auquel elle devait être comparée. Le Conseil d’Etat estime même que la solution proposée devrait permettre quelques économies.
Le Conseil d’Etat considère donc que les études complémentaires réalisées, même si elles arrivent à des conclusions différentes, ne sont pas de nature à remettre en question l’analyse qu’il avait menée à la fin de l’année 2011 et présentée dans son rapport 12.005. Le scénario du Conseil d’Etat est économique. Il peut en outre être mis en œuvre à court terme et permet de développer des synergies intéressantes. Ses inconvénients peuvent être facilement palliés. En outre, il est le seul à permettre de rétablir un équilibre relatif entre les sites de La Chaux-de-Fonds et de Neuchâtel, conformément à ce que demande la loi sur l’EHM, plébiscitée par la population et l’initiative du PSN.
Comme l’avait souhaité le Grand Conseil dans son décret du 24 avril 2012, mon Département a travaillé en étroite collaboration avec la Commission « Santé » du Grand Conseil qui a suivi de très près les travaux de mon département et de l’expert, notamment par le biais de son bureau élargi. La majorité de cette commission rejoint les conclusions du Conseil d’Etat, ce qui conforte aussi le Conseil d’Etat dans son choix.
Le Conseil d’Etat, comme certainement chacun d’entre vous, est conscient qu’il est difficile de réunir une unanimité derrière quelque projet de répartition des missions hospitalières que ce soit. L’hôpital peut être organisé de dix manières différentes, au même prix et dans chaque cas, avec des avantages et des inconvénients. Il n’y a pas de solution miracle.
La seule question qui se pose aujourd’hui c’est voulons-nous organiser notre hôpital de manière à ce que les deux sites de Neuchâtel et la Chaux-de-Fonds fonctionnent bien et de manière efficiente, disposent de tous les services utiles à la population et soient attractifs pour les médecins et les autres employés ? Où voulons-nous démanteler subrepticement le site de La Chaux-de-Fonds, préparer un site de soins aigus unique à Pourtalès, quel qu’en soit le prix, car les grandes concentrations coûtent très cher, et quelles qu’en soient les conséquences pour la population du haut du canton et des vallées? Aujourd’hui déjà, nous n’avons plus assez de généralistes et de pédiatres à La Chaux-de-Fonds. C’est un bassin de population de 60’000 habitants qui est ainsi mal desservi. Ca, c’est le choix que vous avez aujourd’hui. Le Conseil d’Etat a fait le choix du service à l’ensemble de la population du canton et non pas seulement à une partie du canton.
Il considère dès lors que le canton de Neuchâtel ne peut pas se permettre d’attendre encore plus longtemps avant qu’une décision politique claire soit prise.
Après des années de réflexion, les patients, la direction et les collaborateurs d’HNE, ainsi que la population doivent aujourd’hui savoir dans quelle direction le politique souhaite faire évoluer l’hôpital cantonal. Le Parlement a souhaité disposer de plus de compétences en matière de politique hospitalière et il lui revient aujourd’hui de prendre ses responsabilités.
Dans son rapport, le Conseil d’Etat proposait de refuser les initiatives. La commission propose au Grand Conseil d’en accepter deux sous la forme de projets de loi et de proposer le refus de la troisième. Le Conseil d’Etat ne s’y oppose pas. Le but de son rapport est de se rapprocher autant que possible des demandes des initiants et il pense y être arrivé, pour l’essentiel. Du point de vue du Conseil d’Etat, les deux premières initiative sont réalisées. Leur acceptation ne pose donc pas de problème. La troisième est refusée par la commission. Le Conseil d’Etat approuve cela, car elle n’est aujourd’hui plus que très difficilement réalisable et elle est contradictoire avec les autres.
Si ce décret du Conseil d’Etat est adopté aujourd’hui, le Conseil d’Etat demandera bien sûr formellement au comité de la troisième initiative s’il maintient son texte. Le comité a la possibilité de retirer son initiative jusqu’au moment où le Conseil d’Etat fixe la date de la votation populaire.