Convention de l’UNESCO sur les biens immatériels

Monsieur le Président,

Monsieur le Conseiller fédéral,

Chers Collègues,

 

C’est sans aucune réserve que je vous propose de ratifier les deux conventions de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel et pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.

 

Ces deux conventions sont très novatrices, car on y parle pour la première fois de la volonté des Etats de préserver le patrimoine culturel immatériel, c’est-à-dire ce qui constitue le fondement de la culture des peuples et la diversité des expressions culturelles. C’est la première fois aussi que l’on élabore un instrument juridique, qui garantisse la diversité culturelle et reconnaisse le droit des Etats de conduire leur propre politique culturelle. Grâce à ces deux conventions, notre patrimoine culturel, longtemps sous-estimé quant à sa signification régionale, nationale et internationale, trouve enfin une reconnaissance générale.

 

Ces deux conventions correspondent parfaitement aux préoccupations de la Suisse et à la politique culturelle qu’elle défend et qu’elle promeut depuis de nombreuses années. La Suisse est un pays de traditions. Nous sommes fiers de nos particularismes locaux. Nous nous attachons à préserver nos fêtes, la vie de nos sociétés, nos savoir-faire ancestraux, notre artisanat et nos multiples expressions linguistiques et artistiques traditionnelles et populaires. Nous connaissons l’importance de ce patrimoine qui participe à la richesse culturelle de notre pays, à notre identification à notre région et finalement à la cohésion nationale. Nous sommes attachés à nos particularités et nous avons à cœur de les reconnaître, de les soutenir, de les faire connaître et de les faire reconnaître.

 

Nous sommes aussi un pays multiculturel, particulièrement attentif à la préservation de l’identité de chacune de ses parties. Nous avons toujours déployé des efforts soutenus en faveur de la préservation de chacune de nos cultures. Nous avons même inscrit le respect de notre diversité culturelle dans la constitution. Par leur compétence dans le domaine culturel, les cantons sont à l’avant-poste de cette politique. Ce modèle de soutien décentralisé à la culture est aussi garant de la richesse et de la diversité culturelles de notre pays. Il est donc réjouissant de constater que les cantons ont très largement approuvé la ratification de ces conventions et adhèrent aux mesures d’application prévues.

 

L’application de ces conventions ne nécessite donc pas d’adaptation particulière des institutions de notre pays. Elles encouragent bien sûr le maintien de nos institutions culturelles. Elles encouragent aussi les échanges et la transmission des savoirs et des expressions culturelles. La convention sur les biens immatériels accorde une grande importance à l’oral, à la langue, à la musique populaire, aux danses, aux légendes, ce qui est très nouveau au niveau de la préservation de la culture. Or la vitalité de ces expressions culturelles dépend évidemment de ceux et celles qui sont prêts à les vivre et à les transmettre. Ces transmetteurs et transmetteuses jouent un rôle central et doivent obtenir le soutien nécessaire à leur activité. Sans quoi, notre patrimoine culturel risque de perdre son dynamisme et de se replier peu à peu vers les musées. Cette transmission de personne à personne fait aussi beaucoup pour le contact entre les générations et pour l’intégration des nouveaux arrivants.

 

D’une manière générale, le maintien de traditions vivantes a aussi un intérêt économique et en particulier touristique, qu’il est certes difficile de chiffrer, mais qui participe à l’image et à l’attractivité de notre pays.

 

Il serait judicieux que dans la phase d’élaboration de l’application de ces conventions, les milieux culturels puissent s’exprimer, voire participer à la réflexion, qu’une analyse soit menée, que des priorités soient fixées.

 

Il est très important que ces conventions puissent être rapidement ratifiées par un grand nombre d’Etats, ce qui est heureusement déjà le cas, car  la culture de nombreux peuples est mise en danger par l’uniformisation. En même temps qu’une mondialisation économique, nous vivons aussi, en quelque sorte, une mondialisation de la culture. Les cultures occidentales tendent à supplanter les cultures autochtones et les modèles de sociétés que nous connaissons s’imposent peu à peu dans presque toutes les parties du monde. C’est un affaiblissement des particularismes régionaux et un appauvrissement de la diversité culturelle. C’est sans doute une évolution difficile à freiner. Ces Conventions de l’UNESCO proposent quelques outils.

 

Elles se fondent sur le respect mutuel des expressions culturelles et des identités régionales et nationales, mais je tiens aussi à souligner, qu’il est clair que dans le cadre de la convention sur les biens immatériels, la préservation des diverses cultures ne peut justifier le maintien de pratiques traditionnelles contraires aux droits de l’homme ou à l’intégrité de la personne.

 

La Suisse a un rôle à jouer sur le plan international. Elle a des cultures riches. Elle en est consciente et les a toujours préservée. Elle peut mettre son expérience à disposition, mais aussi apprendre comment d’autres Etats vivent leur multiplicité culturelle. Elle a apporté beaucoup à ces conventions. Ces échanges ne peuvent qu’être favorables à notre image et à notre place sur la scène internationale.

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