EXPRESS-IMPARTIAL
« Pour retrouver l’équilibre régional »
Répartition des activités entre les sites de l’Hôpital neuchâtelois (HNe): après des années de tergiversation et de crises en tous genres, le Conseil d’Etat a tranché. Enfin!, diront bon nombre de personnes, à commencer par les collaborateurs de l’hôpital, dont certains sont pour ainsi dire victimes au quotidien d’incertitudes… qui ne sont pas encore levées, puisque la balle est désormais dans le camp du Grand Conseil, puis des trois comités d’initiative (qui retireront ou non leurs textes).
Ces décisions, qui s’écartent sur plusieurs points des propositions de l’Hôpital neuchâtelois (notre édition du 2 novembre), quelles sont-elles? Pour ce qui est du sujet qui a le plus fâché, à savoir la chirurgie, le gouvernement veut « créer un centre cantonal de chirurgie stationnaire » à La Chaux-de-Fonds. Autrement dit, toutes les interventions chirurgicales débouchant sur une hospitalisation avec au minimum une nuit se feront à La Chaux-de-Fonds. La chirurgie ambulatoire (avec entrée et sortie du patient le jour même) sera localisée, elle, à l’hôpital Pourtalès. C’est dans cet établissement également que se trouvera le centre de l’appareil locomoteur, avec en premier lieu l’orthopédie (interventions planifiées et traumatologie).
Ce n’est pas tout pour les deux principaux hôpitaux du canton: le site de La Chaux-de-Fonds voit « la confirmation de l’implantation du centre d’oncologie » (cancers) et « la création d’un centre de sénologie (réd: maladies du sein) reconnu au niveau national » . Pourtalès, de son côté, se voit attribuer « définitivement » le centre femme-mère-enfant (donc la maternité, la gynécologie et la pédiatrie). Ce centre était supposé s’installer à La Chaux-de-Fonds en 2015, mais ça n’était devenu que théorique…
Le gouvernement présente ses décisions comme « des choix clairs pour la création de centres de compétences forts et un équilibre régional retrouvé » . Retrouvé, dans la mesure où le Conseil d’Etat indique « renforcer le site de La Chaux-de-Fonds » . Le travail de longue haleine du groupe interpartis de soutien à l’hôpital de La Chaux-de-Fonds, appuyé par l’envoi de 10 000 lettres de citoyens au Conseil d’Etat, a donc porté ses fruits: le projet du gouvernement, pour l’essentiel, correspond à celui du groupe interpartis. Un groupe qui, après l’installation de fait du centre femme-mère-enfant à Pourtalès, demandait « une juste répartition des missions entre les deux sites principaux du canton » .
Ces deux sites continueront par ailleurs de disposer chacun d’un service de médecine, de soins intensifs, d’un service d’urgence et d’un bloc opératoire ouvert 24 heures sur 24.
« Il faut dire les choses comme elles sont. Pour nous, le plus important, c’était d’abord le taux d’acceptation de notre rapport » , a commenté le conseiller d’Etat Philippe Gnaegi, hier matin, lors de la conférence de presse au cours de laquelle le gouvernement au complet est venu présenter le rapport destiné au Grand Conseil. Avant de préciser: « Si nos décisions avaient mis la république en ébullition, nous n’aurions rien gagné. » Claude Nicati a renchéri: « D’une part, nous devions répondre à trois initiatives populaires. D’autre part, nous devions apaiser un climat devenu malsain tant pour le canton que pour l’Hôpital neuchâtelois. »
Est-ce à dire que le Conseil d’Etat a fait passer les aspects politiques avant les considérations médicales ou financières? « Absolument pas! », a répondu celle qui a porté le dossier, Gisèle Ory. « Nos choix sont cohérents médicalement, puisque nous créons des centres de compétences forts, avec toutes les activités du même type au même endroit. Sans compter que nous proposons aussi de nouvelles compétences qui seront utiles au niveau intercantonal. »
Sur le plan financier, la ministre de la Santé explique que « les décisions du Conseil d’Etat permettront d’éliminer des doublons et favoriseront des économies d’échelle ».
Pour l’heure, les chiffres articulés émanent du département de Gisèle Ory. Selon laquelle « le Conseil d’Etat mettra dans les mains des instances dirigeantes de l’Hôpital neuchâtelois des axes stratégiques qui lui permettront de réaliser ces économies. Ce sera à l’Hôpital neuchâtelois de définir précisément comment, sur le terrain, elles seront réalisées. »
Le rapport du Conseil d’Etat est disponible sur le site www.ne.ch, sous « Actualité » – « Options stratégiques d’Hôpital neuchâtelois à l’horizon 2017 ». / pho
Le plan stratégique présenté hier avait notamment pour ambition de réunir une majorité au Grand Conseil et, en toile de fond, de permettre le retrait des trois initiatives populaires lancées contre la version de 2008. Opération réussie? Les premières réactions, hier, allaient de la satisfaction à la déception, en passant par certaines réserves. Mais pas de rejet catégorique.
Le comité d’initiative qui réclame le maintien d’un hôpital de soins aigus et d’une maternité au Val-de-Travers ne pouvait hier que se montrer déçu. Pour Sandra Menoud, membre du comité et députée au Grand Conseil, la déception vient du fait que » des concessions avaient été faites et des compromis élaborés pour, au final, ne recevoir que très peu « .
Il est difficile d’expliquer aux habitants du Vallon qu’ils devront peut-être renoncer définitivement à une maternité de proximité, estime-t-elle. Le comité va se réunir pour décider s’il vaut la peine de maintenir l’initiative ou si ses chances sont trop minces.
L’initiative dite « du Bas », qui entend fixer définitivement le site femme-mère-enfant à Pourtalès, devrait être considérée comme caduque. Cet ancrage est clairement assuré dans le plan stratégique, alors qu’en 2008, le site devait remonter à La Chaux-de-fonds.
Mais Philippe Haeberli, membre du comité d’initiative, émet une réserve: le Centre de sénologie passe à La Chaux-de-fonds, alors qu' » il était plus logique de garder ce service dans le pôle femme-mère-enfant « . Il faut maintenant examiner les conséquences de cette option, avant d’envisager un retrait de l’initiative.
Comme député au Grand Conseil, il se montre plutôt déçu: le maintien des soins intensifs dans le Haut (24 heures sur 24, sept jours sur sept) » va coûter beaucoup d’argent, qu’on pourrait utiliser plus efficacement « .
Ni déception, ni réserves dans le Haut. Bertrand Nussbaumer, membre du comité de l’initiative réclamant « un équilibre régional des missions hospitalières », se montre satisfait du rééquilibrage opéré par le Conseil d’Etat. » C’est un bon plan stratégique « , dit-il.
» Le maintien d’un service d’urgence, opérationnel en permanence, avec une mission claire en chirurgie, voilà qui ouvre des perspectives intéressantes pour l’avenir « , explique Bertrand Nussbaumer, également député au Grand Conseil.
De son côté, le Groupe de travail interpartis du haut du canton estime qu’un » déséquilibre » persiste dans la répartition des missions (60% à Pourtalès, 40% à La Chaux-de-Fonds, selon lui). Mais, ajoute-t-il, » ce déséquilibre est acceptable « .
Le plan stratégique développe de « véritables pôles de compétences »: on ne fait pas tout partout, mais la masse critique est garantie.
Dans une lettre d’information adressée hier au personnel, la direction de l’hôpital de La Providence se refuse à commenter les » intentions du Conseil d’Etat, qui sont claires « . Elle retient, de ce plan stratégique, que les missions attribuées à La providence par HNe » sont intégralement maintenues « .
Le Conseil d’Etat ayant officiellement inscrit La Providence sur la liste hospitalière cantonale, les patients neuchâtelois y auront accès aux mêmes conditions que pour HNe, dans le cadre des missions fixées. Cela vaut pour la dialyse comme pour l’orthopédie.
La lettre ne commente pas non plus le déplacement de l’orthopédie de La Chaux-de-Fonds à Pourtalès, puisque ça ne touche pas celle pratiquée à La Providence. Petite réserve, toutefois: ce transfert concerne le Dr Huber, avec qui les orthopédistes du Bas avaient mis sur pied un centre ostéo-articulaire dont bénéficiaient les patients du Haut. FNU