Mesdames, Messieurs, Chers Amis Neuchâtelois et Neuchâteloises d’Yverdon et peut-être d’ailleurs,
J’ai un scoop… Je vais trahir un secret…. Pour vous avouer qu’il y a quelques semaines, le bureau du Grand Conseil a décidé à l’unanimité que ce serait la vice-présidente du Grand Conseil qui irait à Yverdon pour la fête du 1er mars.
J’ai dû insister, mais il faut dire que j’avais un bon argument : je connais le chemin. J’aurais pu venir à Yverdon les yeux fermés. D’ailleurs, j’y suis venue les yeux fermés, bercée par le Pendolino… C’est en effet la deuxième année que j’ai l’immense plaisir de pouvoir répondre à votre invitation et de vous apporter le salut très cordial du Grand Conseil neuchâtelois, et en particulier de son président, M. Christian Blandenier.
C’est donc presque une tradition pour moi, mais il y a des traditions que j’aime bien et celle-ci en fait partie. Je commence à me sentir chez moi, chez vous. Au fond, je pourrais reprendre pour moi le célèbre adage de Denis de Rougemont : « Le Jura neuchâtelois pourrait continuer ainsi jusqu’au Tibet » !
Cela dit, c’est peut-être une chance pour moi, car si je m’installe dans cette habitude de passer mon premier mars à Yverdon, peut-être que je pourrais aussi payer mes impôts ici… Je ne sais pas ce qu’en penserait notre grand argentier…. Mais peut-être que pour moi, ce serait mieux. Tout d’abord, peut-être bien que j’économiserais quelque chose. Ensuite, on ne publierait pas dans tous les journaux la date à laquelle je les ai payés et on ne me demanderait pas à tous les coins de rue si je les ai payés. Enfin, je n’aurais pas 10% de pénalité pour chaque tout petit retard…
Plaisanterie mise à part, cette tradition est particulièrement agréable, car j’ai le plaisir de vous retrouver, maintenant que je vous connais un peu. J’ai passé une excellente journée à Yverdon l’année passée. Je commence à en prendre le pli…. Et comme l’année prochaine, j’aurai un argument de plus, je serai présidente du Grand Conseil et j’aurai la préséance pour choisir où je vais passer mon 1er mars… alors, vous courez le risque de me revoir…
Le 1er mars est une tradition, mais cette tradition ne serait rien sans ceux qui la font vivre année après année. Merci à vous tous, les organisateurs, les responsables, les bénévoles qui savez si bien faire la fête, qui savez vous rappeler vos origines et qui aimez toujours votre vieux canton. Merci de votre invitation et merci de votre accueil.
Ce 1er mars, c’est pour les Neuchâtelois, un temps d’arrêt, un temps de fête, un temps où l’on se rencontre, où l’on se rappelle. Prendre le temps de dialoguer avec l’autre, de l’écouter, de nous pencher sur notre histoire, se rappeler ce que nos ancêtres ont fait pour nous et réfléchir à ce que nous pouvons faire pour nos descendants. A l’heure où il est de plus en plus question de polarisation, de duel, de confrontation, à l’heure où l’émotion se vend mieux que la réflexion, le véritable dialogue, celui qui cherche à établir un consensus, ce dialogue là est appelé à devenir vertu.
Qui sommes-nous, nous Neuchâtelois, anciens Neuchâtelois de l’extérieur ou Neuchâtelois depuis peu ? C’est la question que nous allons nous poser tout au long de cette année. A travers une vaste réflexion sur la « Neuchâtelitude », si vous me permettez ce néologisme digne de M. Couchepin, à travers les nombreuses manifestations liées au projet Neuchâtoi, auquel nous avons donné le coup d’envoi jeudi passé, nous interrogerons notre identité neuchâteloise. Au programme, plus de 400 événements, dont le premier aura lieu à l’occasion de la commémoration du 1er mars. Le canton de Neuchâtel est constitué aujourd’hui de 25% d’étrangers, de 45 % de Confédérés et de 30% de Neuchâtelois. La population neuchâteloise a passablement évolué au fil du temps et des nombreux brassages qui façonnent jour après jour son visage. Le but de ce projet est de susciter une réflexion, un débat public sur la pluralité des identités neuchâteloises, passées, présentes et futures, ainsi que sur les valeurs et principes communs des habitants du canton de Neuchâtel. Il y aura des expositions, des conférences, des débats, des fêtes et festivals, des jeux, des concerts, du théâtre, du cinéma, de la gastronomie, etc.
Vous y êtes bien sûr cordialement invités.
Je suis persuadée que l’esprit de la fête, que vous continuez à cultiver, vous Neuchâtelois de l’extérieur, à travers ce 1er mars, a un grand rôle à jouer. Celui de nous rapprocher, en nous ouvrant aux autres. Merci d’y contribuer.
On dit souvent que les Neuchâtelois ont une tendance presque maniaque à la régularité et à la précision scientifique. Je constate avec plaisir que si c’est avec ponctualité que nous fêtons ensemble ce 1er mars, en revanche, lorsque l’on fête ensemble, le temps ne compte plus. Même les artisans les plus précis ont le droit de se reposer un peu, d’oublier les échéances. Alors aujourd’hui, pendant que nous célébrons ensemble notre amitié, je souhaite que le temps s’arrête un petit peu à Yverdon.
Nos ancêtres nous ont fait un cadeau merveilleux. C’est l’occasion, en ce 1er mars, de nous rappeler de la valeur de nos institutions démocratiques et de remercier en pensée ceux qui, par leur action, nous permettent aujourd’hui, de vivre dans une république de liberté et de solidarité. Nous devons aussi nous rappeler que rien n’est jamais acquis et que le combat pour la liberté et la démocratie doit recommencer chaque jour. Nous devons rester attentifs, refuser le fanatisme, utiliser nos institutions, car elles ne s’usent que si on ne s’en sert pas ! Et nous rappeler aussi que nous avons une chance que bien d’autres peuples n’ont pas. C’est un trésor. Gardons-le précieusement !
Mais pour l’instant, je veux me souvenir de Louis Pasteur, qui disait « qu’il y a plus de philosophie dans une bouteille de vin que dans tous les livres », alors passons aux actes. Je lève mon verre à nos ancêtres qui sont descendus à Neuchâtel malgré la neige, à vous tous qui perpétuez cette tradition, à l’avenir de notre canton, que je veux plein de succès.