Qu’est-ce que l’assurance invalidité ?
L’assurance invalidité fait partie de notre système de prévoyance sociale.
Notre système de prévoyance sociale est composé de plusieurs assurances très importantes auxquelles sont assujettis tous les membres de notre population.
La plus connue et la plus ancienne est l’AVS, qui permet à toute personne qui a atteint l’âge légal de la retraite de recevoir un petit pécule de l’Etat. L’AVS a l’obligation constitutionnelle d’assurer le minimum vital à toute personne à la retraite. En réalité, ce n’est pas le cas actuellement. La rente maximale ne peut assurer le minimum vital. Pour les personnes qui n’ont aucun autre revenu, elle est complétée par les prestations complémentaires. Les prestations complémentaires sont calculées de manière individuelle, en fonction des charges de chacun.
L’AI est la deuxième de ces assurances. Elle a été créée en 1960.
Son but est d’offrir à toute personne qui ne peut pas travailler en raison d’un handicap, une compensation financière pour le travail qu’elle ne peut accomplir. Cette notion de travail a une grande importance dans la définition de l’AI. On ne compense pas une atteinte à la santé, mais une incapacité de travail.
La LAI définit l’invalidité de la manière suivante :
« L’invalidité au sens de la présente loi est la diminution de la capacité de gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale provenant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident. »
Il y a donc trois éléments distincts à prendre en compte :
Le principe de base de l’assurance invalidité, c’est la réinsertion prime la rente. On va donc tout mettre en œuvre pour permettre à une personne atteinte dans sa santé de se réintégrer dans le circuit professionnel, avant de lui octroyer une rente. Pour cette raison, l’AI se préoccupe aussi de réorientation professionnelle des personnes atteintes dans leur santé. Elle leur propose un travail mieux adapté à leurs capacités et les aide à trouver un employeur. Ce n’est que s’il n’est pas possible de faire une nouvelle formation ou de trouver un emploi en raison de la gravité du handicap, que l’AI octroie une rente, en fonction de degré de handicap. Le degré de handicap est évalué par des médecins, qui décident s’il s’agit d’une incapacité de gain à 30, 40, 60%, etc.
Qui a droit à l’AI dans les conditions décrites ci-dessus ?
Toutes les personnes qui habitent en Suisse sont assurées à titre obligatoire, comme les salariés et les étudiants, ou cotisent à titre facultatif, comme les indépendants.
Les enfants sont réputés invalides, quand l’atteinte à la santé dont ils souffrent aura certainement une influence sur leur capacité de gain.
Les ressortissants suisses qui vivent à l’étranger peuvent s’affilier à une assurance semblable.
En revanche, les étrangers qui viennent en Suisse avec un handicap, n’y ont pas droit, ce qui cause de nombreux problèmes, quand des parents viennent en Suisse pour travailler, avec des enfants handicapés, qui sont nés handicapés à l’étranger.
C’est l’Office AI de La Chaux-de-Fonds qui statue pour toutes les demandes AI qui sont déposées dans le canton de Neuchâtel.
Il prend des décisions dans les domaines suivants :
On voit que ces offices ont de lourdes responsabilités. En particulier aujourd’hui, où ils sont continuellement sous le feu de la critique.
En effet, d’un côté, les médecins se plaignent de leur trop grande sévérité à l’égard de leurs patients. Lorsque je suis allé au Congrès suisse des médecins l’année passée pour présenter la politique de l’AI, beaucoup se sont plaint de l’intransigeance des OAI et plusieurs m’ont cité des cas vraiment préoccupant, où une rente a été refusée à une personne pourtant clairement atteinte dans sa santé.
De l’autre côté, certains se plaignent que les OAI ne savent pas résister à la pression des médecins et des patients et qu’ils accordent des rentes trop facilement, à des malades qui seraient encore réintégrables dans le circuit professionnel.
Une chose est certaine, c’est qu’il y a des différences dans le nombre de rentes octroyées par rapport à la population, d’un canton à l’autre. Des programmes de recherches ont été lancés pour essayer de comprendre ce phénomène, sans que l’on puisse dire que l’on soit arrivé à des résultats probants. Une bonne part de ces différences est inexplicable. Le canton de Neuchâtel est situé dans le peloton de tête des cantons qui accordent le plus de rentes.
Au milieu de ce remue-ménage politique, les médecins sont quelquefois montrés du doigt. On dit qu’ils sont trop proches de leurs patients, trop complaisants. Les OAI se plaignent que les médecins deviennent des avocats. Ils se battent pour obtenir une rente pour leurs patients. Dernier développement de cette tendance : la rente thérapeutique. Le médecin prescrit la rente AI pour soulager ses patients dépressifs de leurs difficultés de vie!
Selon l’OFAS, « Une récente étude* indique que l’évaluation de l’incapacité de travail des personnes assurées est fréquemment problématique pour les médecins. Ils ne connaissent pas assez les exigences liées aux différentes places de travail, ils manquent de critères précis permettant de mesurer la capacité de travail et leurs connaissances dans le domaine de la médecine du travail sont restreintes. De plus, l’étude confirme l’existence de nombreuses confusions entre les diverses notions de capacité de travail, de capacité de gain et de degré d’invalidité. »
« L’étude mentionnée aboutit aux résultats suivants : la notion de maladie sur laquelle les médecins se basent se modifie. La conception qu’a le praticien de sa tâche face à son patient et à la société joue également un rôle déterminant. Ainsi, les diagnostics récents tiennent de plus en plus compte des conditions psychiques et sociales, ainsi que de leurs effets.»
*(Etude d’interface « Die ärtzliche Beurteilung und ihre Bedeutung im Entscheidverfahren über einen Rentenanspruch in der Eidg. Invalidenversicherung » 1999)
Dans le texte d’explications pour la procédure de consultation concernant la révision de l’AI, il est indiqué qu’ « Il est donc indispensable que les rapports des médecins traitants soient vérifiés par des médecins des offices AI. » Cependant, la Confédération estime que cette vérification ne suffit pas. Les disparités cantonales révèlent des pratiques très différentes. Elle veut donc instituer un contrôle au niveau supracantonal.
Elle propose qu’un service médical organisé par régions dans l’ensemble de la Suisse assiste les offices AI en examinant les conditions médicales du droit aux prestations, notamment en ce qui concerne les mesures d’ordre professionnel et les rentes de l’AI. Le Conseil fédéral espère que cette mesure freine la forte augmentation des dépenses provenant des rentes. Le potentiel des économies réalisables par ce biais n’est toutefois pas estimable. En matière d’organisation, la charge supplémentaire qui en résulte est estimée à environ 20 millions. Cette modification du règlement de l’AI entrera en vigueur le 1er janvier 2004.
Pro Infirmis est l’un des partenaires du réseau social. Le médecin détermine si médicalement une personne est apte à travailler. L’OAI octroie la rente partielle ou entière. Pro Infirmis prend en charge les personnes en situation de handicap et les accompagne. Notre souci principal est de préserver l’autonomie et l’indépendance des personnes en situation de handicap.
Nos collaboratrices et collaborateurs sont des professionnels du travail social qui, comme vous, écoutent leur clients et s’efforcent de trouver des solutions à leurs problèmes, tels que budget, démarches auprès des assurances, etc. Ils tissent, avec les personnes concernées, un réseau de soutien, qui les aide à s’assumer et à garder leur autonomie. Les consultations ont lieu où ils le désirent et sont toujours gratuites.
Pro Infirmis gère les prestations d’aide pour les personnes handicapées (PAH). Ce fonds vient en aide financièrement et de manière ciblée à des personnes handicapées, dont le budget est particulièrement serré et qui ne peuvent faire face à des dépenses extraordinaires, telles que l’achat de lunettes, un déménagement, l’achat d’une voiture adaptée, un abonnement général, des moyens auxiliaires, etc…
Pro Infirmis offre également des prestations spéciales, telles que le service de relève de l’entourage, qui permet de décharger ponctuellement celles et ceux qui s’occupent régulièrement d’une personne handicapée, le conseil en construction adaptée, auquel on peut recourir pour des conseils en matière de recherche ou de transformation de logement.
La nouvelle prestation accompagnement représente pour les personnes handicapées mentales, un pas important vers l’autonomie et l’épanouissement individuel. Ces personnes peuvent parvenir à vivre seules dans leur propre logement, à condition de bénéficier d’un accompagnement.
Les écoles d’autonomie de Pro Infirmis et l’accompagnement apprennent aux adultes ayant un handicap mental à prendre des responsabilités et à maîtriser le quotidien. Les sujets enseignés ont trait au ménage, à l’organisation des loisirs, aux rapports avec soi et les autres et à l’utilisation de l’argent.
La fondation Profil de Pro Infirmis favorise l’intégration des personnes handicapées dans le monde du travail.
Toute personne qui est déclarée handicapée par l’OAI, peut être adressée à Pro Infirmis pour une aide dans ces domaines.
2ème partie
Actuellement, l’AI est sur la sellette. Chaque jour on peut lire dans un journal ou un autre des articles sur les « Scheininvaliden ». La campagne contre les personnes handicapées a été particulièrement nourrie en Suisse alémanique, à partir de l’été dernier. Elle a fait suite à l’initiative pour les droits des personnes handicapées. Cette initiative demandait de donner une réelle égalité des chances aux personnes handicapées, en leur permettant une meilleure autonomie, en particulier dans les transports et dans l’accès aux bâtiments publics. Il s’agissait de faire un effort financier mesuré pour adapter les escaliers, les trottoirs, les portes, les transports publics, les guichets, etc. aux besoins des personnes en fauteuil roulant, ainsi que les feux de signalisation et les bords de trottoirs, aux personnes malvoyantes. Cette initiative a été rejetée à une large majorité. Ce sont surtout des arguments de coût qui ont été invoqués. On veut bien faire quelque chose pour les personnes handicapées, mais on ne veut pas que ça coût trop. Et pourtant, il y va de l’autonomie de ces personnes. Or qui dit autonomie, dit aussi diminution de coût de la prise en charge, mais bien sûr, tout cela n’est mesurable que difficilement et à long terme.
Le 1er juillet, la NZZ décrit longuement, sous le titre « Der Missbrauch in der Invalidenversicherung » l’enchaînement : pression dans le travail – chômage – dépression – invalidité. Le 31 juillet, Adrien Bron écrit : « Alerte ! Le nombre d’invalides explose » ; l’UDC lance son slogan de « Scheininvaliden » et se propose de lutter contre les simulateurs, en particulier étrangers, qui retournent dans leur pays avec leurs rentes.
L’AI dépense actuellement 10 milliards de francs. De 1990 à 2000, le coût total de l’AI a passé de 4 milliards à 8,4 milliards de francs. La rente moyenne a passé de 1083.- à 1358.-/mois. Elle est actuellement de 1363.-/mois.
Le nombre de rentiers a passé de 164’000 à 229’000 en 2000. Il est maintenant de 259’000.
Depuis 1990, l’accroissement du nombre de personnes bénéficiant des rentes d’invalidité a été de plus ou moins 5% par an en moyenne. L’augmentation du handicap psychique a été un peu supérieur à celle du handicap physique.
Cela représente actuellement près de 5% de la population active. La Suisse est en train de rattraper les autres pays européens, mais on est encore loin des Pays-Bas, où 10% de la population active est déclarée handicapée. Pour comparaison, dans les pays de l’OCDE, les dépenses des assurances invalidité représentaient en 1995, 4,1% du PIB aux Pays-Bas, 2,7 en Norvège, 2,4 en suède, 1,5 en Autriche, 1,4 en Italie, 1,3 en Suisse et 1.1 en Allemagne.
Ces chiffres doivent nous interpeller. Même s’ils sont faibles en comparaison européenne, l’augmentation constante que nous constatons doit être expliquée. Les programmes de recherches PNR 45 traitent du handicap sous plusieurs angles, mais les résultats ne sont pas encore tous disponibles.
Une chose est certaine : la situation est complexe. Elle ne peut être réduite à un slogan comme : « on met à l’AI les chômeurs dont on ne sait plus que faire». La corrélation entre le chômage et l’invalidité n’est pas probante. Selon l’OFAS, « Le nombre de chômeurs en fin de droit était en forte augmentation jusqu’en 1994, mais le pourcentage de ceux qui, par la suite, obtinrent une rente AI dans un délai de deux ans est resté stable » (un peu plus de 2%).
Mais alors, d’où cela vient-il qu’il y ait autant de personnes invalides actuellement ?
Voici quelques causes d’invalidité parmi d’autres:
– 21% de l’augmentation annuelle provient de l’évolution démographique. La population devient plus âgée en moyenne, or le risque d’être handicapé augmente avec l’âge, donc plus la population vieillit, plus on a une grande proportion de personnes handicapées.
– Les personnes handicapées vivent plus longtemps, car elles sont mieux prises en charge médicalement.
– Le changement des structures familiales fait que les enfants handicapés sont maintenant placés dans des institutions et ne sont plus pris en charge entièrement par leur famille. Il y a là aussi une volonté d’améliorer la prise en charge des enfants handicapés et de les instruire autant que leurs possibilités le permettent. Mais il ne faut pas s’y tromper, cette professionnalisation de la prise en charge a un coût. Elle a aussi un bénéfice, c’est la possibilité pour les enfants d’être scolarisés et rendus aussi indépendants que possible.
– Les accidents du travail, de la route et du sport laissent beaucoup de blessés et de séquelles. Les maladies du travail ne sont pas reconnues en tant que telles, mais elles émargent souvent à l’AI.
– Les douleurs chroniques importantes sont reconnues comme invalidantes, en particulier les lombalgies et la fibromyalgie.
– Les maladies psychiques sont de plus en plus détectées et traitées. Elles ont passé de 24 à 30% des cas AI entre 1985 et 1995. Ce qui reste encore inexpliqué, c’est pourquoi il y a autant d’atteintes graves à la santé psychique actuellement.
– L’exigence accrue de performance et de rentabilité industrielle met de nombreux travailleurs sous une pression insupportable qui conduit à un point de non retour et exclut du marché du travail toute personne moins performante. Autrefois, il y avait encore beaucoup l’emplois qui n’étaient pas très exigeants et qui permettaient à une personne dont les capacités physiques ou mentales étaient faibles de se rendre quand même utile. Actuellement, toute personne un tans soit peu moins performante que la moyenne est éliminée de l’entreprise, car toute sont sous la pression d’une concurrence qui devient de plus en plus dure et toute doivent prendre des mesures de rationalisation et d’économie. Elles commencent par les emplois les moins directement rentables.
Bien d’autres causes pourraient encore être évoquées.
Tout cela concourt à l’augmentation des besoins financiers de l’AI. L’AI est aujourd’hui déficitaire. En 1998, le Conseil fédéral a dû boucher un trou de 2,2 milliards de francs, en transférant de l’argent de l’Assurance perte de gains dans l’AI. Le trou est aujourd’hui à nouveau de 4,5 milliards. Le financement de l’AI doit être revu et assuré à long terme. La solution qui est envisagée aujourd’hui, est une augmentation de la TVA de 0,8 ou de un point.
Vous savez que ce point sera soumis au vote le 16 mai prochain. C’est un élément très important de la politique de l’AI. Si on ne peut trouver de solutions pour assurer le financement de l’AI, on devra faire de telles économies dans ce domaine, que les personnes handicapées en pâtiront gravement.
L’AI souffre déjà aujourd’hui de mesures d’économies dans le domaine des institutions pour personnes handicapées. Elles sont sommées de trouver 5 millions d’économies dans notre canton en 2004. Peut-être le pourront-elles ? Peut-être, mais c’est beaucoup. Dans le canton de Berne, qui a été confronté au même problème, la question a été résolue par la diminution des prestations, c’est-à-dire, concrètement, que des ateliers pour personnes handicapées ont licencié des employés, qu’elles ne pouvaient plus encadrer. Or licencier une personne qui travaille dans un atelier protégé, c’est être sûr qu’elle ne trouvera pas d’autre travail, donc qu’elle restera à la maison, ce qui n’a aucun sens. C’est une perte de contact social, d’autonomie, de qualité de vie. Les institutions neuchâteloises ne veulent pas couper dans les prestations. Elles ont commencé leur réflexion et ont déjà proposé quelques pistes, mais de là à ce qu’on arrive à 5 millions…..
La politique de l’AI pour les prochaines années doit donc s’orienter vers les points prioritaires suivants :
II. Les mesures concrètes
Une fois ces principes généraux posés, il convient de proposer des mesures concrètes :
1. L’intervention rapide
2. La prise en charge par l’AI
3. Les mesures d’incitation
Une fois le problème détecté, la personne menacée de handicap, doit être orientée vers un nouveau travail.
A ce moment-là, se posent de nouvelles questions :
Nous avons d’un côté des personnes en situation de handicap, qui veulent se réinsérer professionnellement.
Nous avons d’un autre côté, des entreprises qui sont soumises aux lois du marché et donc à des exigences d’efficacité et de rentabilité. Notre tissu économique est formé essentiellement de PME, employant peu de personnel et ne disposant d’aucun service du personnel. Ces entreprises ne peuvent souvent ni consacrer le temps nécessaire à l’intégration d’une personne handicapée, ni prendre le risque de voir leur nouvel employé manquer à son travail en raison de difficultés de santé.
Nous avons enfin, des freins institutionnels qui empêchent certaines personnes handicapées de travailler autant qu’elles le voudraient, même si elles ont un métier, qu’elles trouvent un emploi et que leurs compétences sont appréciées par leur employeur. C’est le cas en particulier des personnes atteintes de maladies dégénératives ou évolutives, qui peuvent vivre des périodes de rémission, où elles sont aptes à travailler, mais qui sont menacées de dégradation importante de leur état à moyen terme. C’est le cas aussi des malades psychiques, dont la stabilité n’est pas assurée et qui peuvent toujours faire des rechutes.
Pour tenir compte de cette réalité, nous pouvons prendre trois types de mesures.
Pour inciter les personnes handicapées à travailler, il faut réunir plusieurs points importants.
La première question est celle de la sécurité du revenu. Il faut éviter qu’une personne handicapée ne perde le droit à sa rente, du fait de son insertion professionnelle ou de l’amélioration de ses conditions de travail. Actuellement, si une personne, qui touche une demi rente, se sent bien et décide de travailler à plein temps, elle perd le droit à sa rente. Si elle fait une rechute au bout d’un ou deux ans, elle doit refaire une procédure d’obtention de la rente. Dans de nombreux cas, ce risque est trop important pour une personne dont la santé est précaire et elle doit simplement renoncer à travailler à plein temps.