Quels objectifs stratégiques pour le canton de Neuchâtel face à la globalisation?

Définition de la mondialisation

Le terme de mondialisation est beaucoup utilisé, rarement défini, ce qui explique les divergences d’interprétation. Distinguons d’abord la mondialisation, due à l’augmentation des échanges entre les régions et les pays. Elle est le résultat de l’accroissement des voyages et déplacements de populations et de l’augmentation considérables des moyens de communication. Elle s’exprime à travers le slogan « Le monde est notre village ». Nous y participons tous pleinement. Elle dégage en particulier ses effets au niveau culturel.

La mondialisation des échanges commerciaux et financiers est due à une politique concertée de libéralisation des échanges. Elle dépend des règles qui sont discutées au sein de l’OMC. Elle touche les secteurs qu sont réglementés par l’OMC, en particulier le commerce international. Elle peut être orientée, accélérée ou freinée.

La culture 

L’augmentation des communications nous permet de savoir ce qui se passe à l’autre bout de la planète à chaque heure du jour. Le foisonnement et la rapidité de l’information nous ouvre le monde immédiatement sur les cultures éloignées et tous les événements culturels. Cependant, les media, uniformisés et tenus par de grandes chaînes de diffusion à l’échelle planétaire, déversent les mêmes émissions du Groenland au Cap, avec le risque de nivellement culturel dans l’ensemble du monde. L’uniformisation est le principal ennemi de la culture parce qu’elle en réduit la richesse en réduisant la diversité. Il faut donc enrichir la culture locale et développer les échanges culturels avec d’autres cultures locales. Ne pas accepter l’uniformisation

Ce qui change aussi, avec la mondialisation, c’est l’augmentation des flux de populations, les mélanges de populations. Cela signifie pour nous, une politique d’intégration, d’acceptation des cultures autres, la possibilité donnée à chaque culture de vivre sa spécificité, mais aussi de s’enrichir des autres cultures. Une volonté politique de multi-culturalité, afin d’éviter le nivellement.

Les media

Les media sont aujourd’hui des vecteurs importants de la culture. Ils sont  directement liés à l’offre et à la diversité culturelle. Devons-nous avoir une volonté politique de maintenir des réseaux de TV et radios non privés qui puissent être les supports d’une culture régionale et non seulement les véhicules d’une culture commerciale dominante et mondiale. Nous sommes au cœur du débat sur l’aide aux media et sur leur indépendance, ainsi que de la survie des media locaux, avec le problème de la centralisation des media et de leur reprise par quelques grandes chaînes soumises à la contrainte de la rentabilité, c’est-à-dire à un nivellement vers le moins cher des programmes et à la diffusion d’une culture moyenne reconnaissable par tous. Voulons-nous nous laisser porter par la vague ou au contraire avons-nous une volonté politique de développer une culture régionale ?

Les migrations de populations, les travailleurs, les  réfugiés, les sans-papiers.

La mondialisation c’est aussi l’augmentation des flux de population. Les transports performants dons nous disposons permettent des déplacement importants de personnes sur des distances plus grandes qu’autrefois. La confrontation des cultures qui en résulte.  Est donc aujourd’hui un réel problème de société. Aux flux de travailleurs que nous avons connus depuis un siècle, s’ajoutent les arrivées de réfugiés en provenance du monde entier. Beaucoup sont destinés à rester chez nous. Comment leur donner une place dans notre société ? Comment les intégrer dans le monde du travail ? Agir sur place ou chez nous ? Comment éviter le problème des sans papiers ? Faut-il modifier la loi fédérale ?

L’agenda 21

L’agenda 21 est la concrétisation des objectifs fixés par le sommet de la Terre de Rio. Il traite des questions concrètes dans la perspective du développement durable. Il propose d’aborder chaque problème globalement, dans l’optique économique, sociale et environnementale. L’agenda 21 cantonal doi6t permettre de fixer des objectifs aussi dans le cadre de l’intégration des étrangers à la vie sociale, son but étant toujours la recherche de l’équilibre et de la pérennité de la société. Il est le cadre de toute autre action et la référence qui doit permettre de mettre en perspective toute autre action.

L’intégration culturelle et la lutte contre l’exclusion

Les différences culturelles rendent quelquefois difficiles la compréhension entre les différentes cultures voisinant dans une société. C0omment permettre à ces différentes cultures de se rencontrer, d’échanger et de se comprendre et de s’accepter mieux ? Elaboration d’un programme d’échanges culturels à l’intérieur de la même localité entre les différentes communautés. Possibili6té d’apprendre la langue pour les étrangers arrivant. Suivi bénévole des enfants commençant l’école. Intégration des femmes dans un réseau d’échanges, pour éviter l’enfermement au foyer. Eviter la création de ghettos de différentes nationalités. Soutien aux communautés étrangères et à leurs associations pour leur permettre de faire pleinement partie de la vie associative des régions. Invitation des communautés étrangères aux manifestations locales. Emissions où l’on présente et où l’on permet aux communautés étrangères de s’exprimer. Organisation de semaines culturelles étrangères.

La re-localisation des échanges économiques et sociaux

Relocalisation des échanges économiques et sociaux. Comme mouvement pour lutter contre l’anonymat lié à la mondialisation. La mondialisation induit des échanges commerciaux à très longue distance. En outre, les échanges fondés sur la capacité financière excluent de l’échange tous ceux qui sont financièrement faibles. Un des moyens de pallier ce problème est la mise en place des systèmes d’échanges locaux. Ils ont pour but de relocaliser les échanges pour des raisons écologiques, Les producteurs et les consommateurs sont en relations directes, ce qui diminue la distance des transports. Au niveau économique, on a une réintégration des économiquement faibles dans un système d’échanges. Au niveau social, on a des échanges de services qui permettent à tous de valoriser leurs compétences et de s’intégrer dans un réseau au niveau de leur localité.

Le multiculturalisme

Acceptation et intégration du multiculturalisme. Admettre la cohabitation de nouvelles cultures et renoncer à la perspective des « faiseurs de Suisses ». On peut être Suisse, vivre en Suisse, et avoir des cultures très différentes. Il faut une campagne médiatique et sociale pour favoriser la vie des cultures ensemble.

Le multilinguisme

Volonté de maintenir le multilinguisme et de ne pas céder à la facilité réductrice de passer automatiquement à la langue dominante, en privant les autres cultures de leur support. C’est un débat qui a lieu aujourd’hui au niveau de l’école et qui a une portée très large, une portée qui dépasse même le simple respect de l’équilibre de notre pays et de l’entente confédérale. Ce débat est déjà un test de ce qui nous attend à une plus large échelle au niveau mondial où un grand nombre d’idiomes et de langues sont appelés à disparaître, au profit d’un seul support.

L’éducation

L’école a une responsabilité particulièrement grande dans le domaine de l’intégration culturelle. Intégration des étrangers dans les classes. Introduction du multiculturalisme dans les programmes scolaires. Contacts avec les cultures étrangères dans le cadre des activités para-scolaires. Mise en valeur de la culture locale.

L’égalité des chances

Comment donner aux étrangers arrivant en Suisse, en particulier aux enfants dans le cadre de leurs études des chances de se réaliser malgré leur différences culturelles et linguistiques ?

La lutte contre la pauvreté

La mondialisation libérale entamée il y a un peu plus de dix ans a eu une conséquence : l’augmentation des différences entre riches et pauvres dans le monde en général entre pays industrialisés et Tiers Monde et au sein même des sociétés développées. Ces différences portent les germes d’un déséquilibre social et de troubles sociaux. Dans la perspective du développement durable, il faut lutter contre cette polarisation sociale. Engagement contre la libéralisation des services publics, qui exclut une partie de la population des systèmes de santé ou d’éducation de qualité. Mettre en discussion l’AEGS sur la place publique.

La collaboration internationale

Ce n’est pas parce que notre canton est petit qu’il ne peut pas s’impliquer à sa mesure dans une politique d’échanges internationaux. Notre canton a la possibilité de développer des échanges bilatéraux avec des pays en difficulté, afin de travailler directement sur place à éviter les flux de migration de type économique. Voir Causes communes.

La collaboration transfrontalière

S’efforcer de travailler ensemble par dessus les frontières et créer une unité de destin par dessus la frontière est aussi un but à mettre en relation avec la mondialisation et les échanges transfrontaliers. Le PNR en tant que créateur d’une unité transfrontalière va beaucoup plus loin que l’élaboration d’un nouveau modèle de développement durable en Suisse et dans notre canton, bien que la notion de développement durable fasse intimement partie aussi de la nouvelle société que nous devons créer au niveau mondial, parce que c’est une analyse globale des ressources de la terre et de leur avenir. Le PNR ajoute à cette réflexion lancée à Rio en 1992, la notion d’espace transfrontalier au cœur de l’Europe. Il s’agit de créer de nouvelles entités qui ne tiennent plus compte des frontières et qui contribuent à créer un nouvel esprit de collaboration internationale. Ce n’est pas facile du tout, quand on a été séparés par des siècles de politiques différentes de se mettre ensemble et de réussir ensemble un projet de création. Le PNRD est aussi une tentative d’ouverture sur le monde, de collaboration transfrontalière, de création d’un espace sans frontière. Il intègre complètement les idées de la mondialisation que j’ai déjà exposées, en favorisant en même temps l’échange culturel au niveau régional et le maintien d’une identité culturelle, par la mise en valeur des spécificités de notre région.

L’université et la recherche

Dans le cadre de la « mondialisation autrement » et de l’influence que nous pouvons avoir sur les réflexions qui se font au sein de la délégation suisse à de l’OMC, notre canton peut aussi se positionner de manière à se trouver dans une situation aussi bonne que possible. La première chose, c’est de savoir ce qui se passe sur la scène internationale. De pouvoir comprendre les grands mouvements, leurs enjeux, d’en analyser les conséquences. C’est là que nous pouvons élaborer un projet d’étude de la mondialisation que j’appellerais « observatoire de la mondialisation ». Nous n’en avons pas en Suisse. Les informations dons nous disposons sont souvent partielles. Personne n’est en mesure de les analyser de manière sérieuse. Personne n’en détermine les conséquences avant que les décisions soient prises. Personne ne sait dans le public ce qu’est réellement la mondialisation. Sur quels éléments avons-nous prise ? Sur lesquels n’avons-nous pas d’influence ? Comment exercer un pouvoir démocratique dans ces conditions ? Il faut un institut d’études qui nous permette de connaître les fondements et les implications de la mondialisation et une instances de vulgarisation qui permette de poser le débat sur la place publique. Il serait donc intéressant de positionner l’université de Neuchâtel dans ce créneau de recherche économique et sociale, avec un institut de pointe en matière d’analyse de la mondialisation et mettre cet institut en relation avec une instance capable de vulgariser ces thèmes et de les amener sur la place publique

Gisèle Ory

22.10.01

 

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