Planification hospitalière

Mesdames, Messieurs,

La planification hospitalière est une obligation qui nous est faite par la Confédération. La LAMal, à son article 39, précise que les cantons doivent faire l’état des lieux de l’offre en matière de soins hospitaliers et prévoir les besoins pour les années à venir, en ce qui concerne les hôpitaux, cliniques privées et EMS.

A la base de cette réflexion, il y a bien sûr le souci, de limiter l’accroissement des coûts de la santé et une préoccupation, si les coûts de la santé augmentent, c’est certainement parce que l’on veut offrir une santé de qualité à l’ensemble de la population. Chacun et chacune, quel que soit l’état de sa fortune, doit avoir accès aux soins les plus performants, quand sa santé est en jeu. La LAMal a permis d’atteindre cet objectif de qualité et d’égalité de traitement entre les patients hommes et femmes, jeunes et vieux, aisés ou non.

La Suisse n’est pas dans une mauvaise position. Les coûts de la santé en Suisse sont plutôt bas en comparaison avec les USA, selon l’étude que l’OCDE a menée en 2000.  En revanche, la charge qui pèse sur les familles est élevée en raison du système de prime par tête, non liée au revenu.

Cependant, le freinage de l’augmentation des coûts de la santé reste un objectif extrêmement difficile à atteindre, et ceci pour une raison simple, les acteurs de la santé sont nombreux, ont des priorités différentes et les diverses expériences tentées ont toutes rapidement montré leurs limites d’application : le contrôle des coûts des médicaments est facilement détourné en créant de nouveaux médicaments presque semblables et plus chers. L’offre médicale se heurte à la liberté des médecins et à la facilité qu’il y a de convaincre une personne que sa santé mérite les traitements les plus onéreux. Une diminution du coût d’un traitement est automatiquement compensée par une augmentation du volume des actes médicaux. Nous ne sommes pas dans un système de concurrence et l’offre peut être suscitée par ceux qui y répondent. Les assureurs ne sont pas motivés par des investissements en vue d’économies dans les prestations de base, puisqu’ils ne sont pas autorisés à faire des bénéfices sur l’assurance de base. Le patient, quant à lui, désire évidemment toujours ce qu’il y a de mieux, quand sa santé est menacée. Alors ?

Il reste quelques mesures que l’on essaie de mettre en application. Ce n’est pas facile non plus. Alors, il faut rationaliser. C’est sans doute aujourd’hui l’une des pistes les plus prometteuses. La restructuration hospitalière en est une. Elle est destinée essentiellement à éliminer les surcapacités et les doublons, à concentrer les soins aigus particulièrement coûteux dans les grands centres pour faire des économies d’échelle tout en assurant la qualité de la prise en charge. Elle se heurte à de multiples intérêts particuliers, intérêts qui tous estiment que les économies doivent être faites chez les autres, mais qui estiment toujours que les autres n’en font pas assez. La restructuration du secteur hospitalier répond à une exigence de rationalisation, imposée par la situation financière du canton, autant que par la LAMal. En effet, si le canton ne parvient pas à rationaliser ses structures hospitalières, la Confédération pourrait lui demander de participer au financement des frais suscité par ses surcapacités. « La planification hospitalière vise à améliorer l’accès aux soins de qualité, à réduire, les surcapacités et à mieux coordonner les fournisseurs de prestations. Ainsi, elle contribue à une meilleure utilisation des ressources, conduisant à la maîtrise des coûts ». « Dans le domaine de la santé, les changements sont fréquents et complexes : révisions de la LAMal, limitation de l’ouverture des cabinets médicaux, transfert du coût à la journée vers le remboursement à la prestation (APDRG), etc. Les cantons ont un rôle important à jouer. Ils participent aussi, et même directement en prise avec la réalité, à la maîtrise des coûts.

La réflexion sur la planification était partie en 1997 de la constatation que les coûts de la santé étaient particulièrement élevés dans notre canton et que l’offre hospitalière n’était pas optimale. On dénombrait trop de lits et trop d’équipements.

Ce qui a été réalisé depuis lors est tout simplement impressionnant. C’est une restructuration complète du domaine des soins physiques, l’intégration des hôpitaux dans une planification cantonale adéquate, une répartition des activités rationnelle, réalisée dans le respect des différentes régions et des attentes des acteurs de la santé. Cette planification est fondée sur le consensus, sur la concertation avec les acteurs concernés du système de santé. Ce sont des années de travail en commun qui trouvent ici leur couronnement. Nous remercions le Conseil d’Etat de la qualité de ce rapport et de la qualité du travail qui a été fourni pour parvenir à ce résultat.

Il a fallu redéfinir les rôles de chacun et créer des unités de suite de traitement, pour les patients ne nécessitant plus de soins aigus. Les tâches ont été réparties entre les hôpitaux principaux de Neuchâtel et de La Chaux-de-Fonds, de manière à éviter les doublons et à préserver les intérêts de chacun. A Neuchâtel nous disposerons dès 2005 d’une structure nouvelle particulièrement performante. A La Chaux-de-Fonds, c’est un projet de rénovation qui va démarrer incessamment. Des soins aigus ont été maintenus à l’hôpital de Couvet, vu l’éloignement de celui-ci. En revanche, les maternités de La Béroche et du Locle ont été fermées, les soins aigus seront abandonnés à Landeyeux dès 2005 et ces hôpitaux réorientés vers les suites de traitement et la réadaptation. Un projet de rénovation est également en cours au Locle. La Providence s’est vu attribuer des tâches qui lui conviennent et la Chrysalide continue sa mission.

En 2003, il y a eu un premier rapport d’évaluation de la planification, qui a confirmé que les options suivies étaient judicieuses et qui a fait quelques propositions d’amélioration de la répartition des tâches entre Neuchâtel et La Chaux-de-Fonds, mais évidemment, le grand projet actuellement, c’est l’EHM, dont Odile Duvoisin nous parlera tout à l’heure.

En ce qui concerne les soins psychiatriques, il s’agissait aussi de rationaliser l’offre. On avait les mêmes problèmes de surcapacité et de doublons à Perreux et Préfargier, que dans les hôpitaux de soins physiques. On a donc clarifié les tâches de chacun et réadapté l’offre à la demande, en particulier en diminuant l’offre hospitalière par rapport à l’offre ambulatoire. En revanche, la mise en réseau des hôpitaux est moins avancée que pour les soins physiques. Le problème est différent, car le déplacement des patients entre l’hospitalier et l’ambulatoire est fréquent et doit se faire de manière continue. On souffre actuellement d’une trop grande séparation entre les deux. Uns synergie doit être améliorée entre les deux. Il faut mettre en réseau l’ambulatoire, le clinique et le centre psycho-social.

–      La création d’une unité psychogériatrique au Locle est inscrite dans le projet de rénovation du Locle

–      Une unité pour adolescents a été créée à Préfargier

La planification sanitaire a permis de faire quelques économies et de freiner ainsi l’augmentation des coûts de la santé, mais elle a aussi eu des conséquences sur le personnel. Grâce à un bon suivi, les choses se sont passées aussi bien que possible. La convention collective de travail CCT Santé 21 a pu être signée. C’est un immense chantier et une grande réussite, parce qu’il y a eu une notable amélioration des conditions de travail du personnel de la santé. Dès 2005 sa mise en œuvre sera terminée et le personnel de la santé travaillera partout aux mêmes conditions. Les chefs de clinique et médecins assistants ont aussi signé une convention, qui a nettement amélioré leur sort, en particulier au niveau des heures de présence. Les médecins cadres et les médecins consultants vont suivre. La CCT 21 est une condition importante de la mise en place de l’EHM, car elle a permis l’harmonisation dans l’ensemble du réseau et à facilité la coopération entre les hôpitaux.

Enfin, les travaux administratifs ont été regroupés au sein du CIGES, Centre d’information, de gestion et d’économie de la santé, ce qui a rationalisé ce secteur de manière importante.

Dans le domaine des homes pour personnes âgées, on a fait une étude des besoins, constaté qu’on a de plus en plus besoin de homes médicalisés. On a donc transformé un certain nombre de homes simples en homes médicalisés pour répondre à la demande. Cela correspond aussi à un confort de la personne âgée, que l’on évite de devoir transférer d’un home à l’autre au moment où sa santé se détériore. La planification prévoit encore la création d’une unité d’accueil temporaire et foyer de jour sur le littoral.

Trois études ont également été menées en ce qui concerne l’adaptation des soins à domicile à la demande et la définition des différentes prestations à fournir. Elles ont permis de faire de nombreuses propositions d’amélioration. Certaines sont déjà fonctionnelles, comme la gestion centralisée.

Ce rapport est très complet et montre que l’on a fait un travail approfondi dans tous les domaines de référence. Avec ce rapport, le Conseil d’Etat a participé dans toute la mesure de ses compétences à la maîtrise des coûts de la santé.  On peut déplorer cependant que les économies réalisées soient immédiatement compensées par des charges considérables qui sont reportées sur les cantons. En particulier la contribution des cantons pour les hospitalisations privées et semi privées pour les hôpitaux reconnus d’utilité publique, heureusement pas encore pour les cliniques privées.

Reste cependant la question de l’hôpital de la Providence, qui n’a pas désiré s’intégrer dans l’EHM, mais qui participe cependant à la planification. Dans quelle mesure cette attitude sera-t-elle viable à long terme, dans un souci de rationalisation de l’offre hospitalière ?

L’objectif prioritaire est la prise en charge optimale du patient et la qualité des soins. Nous souhaitons que cela reste aussi l’objectif principal de tous les participants à ce projet et que les intérêts particuliers des uns et des autres ne viennent pas remettre en question une organisation performante, patiemment construite avec la participation de chacun. Aucune organisation n’est idéale. Nous devons travailler avec les moyens que nous avons et rester capables d’évoluer. La nouvelle organisation de la santé est un défi important pour notre canton. Nous sommes en train de le relever. La réflexion et les choix sont bons. Tout est en mouvement dans le secteur de la santé. Il y a donc encore une certaine incertitude et il faut être capable de s’adapter rapidement. Il faut aussi être prudent et avoir l’adhésion des partenaires. Le concept doit rester participatif et se construire sur la base de la confiance. On est parti d’une situation très difficile et on a construit peu à peu.

Le groupe socialiste prend acte avec satisfaction du rapport du Conseil d’Etat sur la planification hospitalière et l’en remercie. Il accepte le classement des motions.

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