1. Introduction
Le nombre de rentiers AI a considérablement augmenté ces dernières années. Cela pose un problème humain : de plus en plus de personnes sont exclues du marché du travail pour raison de santé et doivent vivre dans des conditions difficiles des points de vue social et financier. Cela pose aussi un problème de coûts : l’AI est en déficit. Sa dette s’accroît chaque année de plus d’un milliard de francs.
La cinquième révision a pour objectifs de mettre en place des solutions à long terme pour prévenir le handicap, éviter l’exclusion professionnelle et sociale des personnes handicapées et contrôler l’augmentation des coûts. Nous ne pouvons que nous rallier à ces buts.
Cependant, ils ne pourront être atteints que si l’AI dispose de moyens suffisants pour la formation et la réinsertion professionnelle et que si les personnes concernées trouvent effectivement du travail. C’est bien là que réside le grand défi de cette révision.
A l’heure actuelle, le marché du travail est saturé. Les personnes handicapées trouvent difficilement un emploi, en particulier les personnes handicapées psychiques. Comment inverser cette tendance ? L’analyse ci-dessous essaie de dessiner quelques pistes. Des freins à l’emploi doivent être desserrés. Cependant, il est à craindre qu’en l’absence d’incitations fortes, les résultats soient très maigres. Or la 5ème révision ne prévoit pas d’incitation forte.
En refusant une rente à une personne de santé fragile, sans pouvoir lui trouver du travail, on peut provoquer une marginalisation rapide. Cette personne ne pourra que recourir à l’aide sociale et verra sa situation financière, sociale et médicale se détériorer. Le recours à l’aide sociale est aussi un transfert de charges de la Confédération aux cantons et aux communes. Les rentes AI économisées sont ajoutées aux budgets des autres collectivités publiques.
Le 24 septembre 2004, l’OFAS a mis un projet en consultation. L’analyse qui suit se fonde sur les documents mis à disposition à cette occasion. Le nouveau message ne diffère que faiblement de cette version.
2. Objectifs de la révision
Commentaire du message
Le nombre de cas d’invalidité augmente régulièrement. Prévenir l’invalidité vaut toujours mieux que la reconnaître une fois qu’elle survient. Cependant, pour pouvoir la prévenir, il faut comprendre les causes des divers handicaps et agir à leur niveau. Il n’est pas très facile de déterminer ces causes avec précision, car elles sont nombreuses et parfois interdépendantes (vieillissement des personnes handicapées, définition des maladies, changements de société, marché du travail, santé publique, fonctionnement des assurances sociales, etc.). Si de nombreuses hypothèses ont été formulées, elles n’ont pas été démontrées scientifiquement.
Etudier les causes. Il serait intéressant de savoir pourquoi autant de personnes sont aujourd’hui atteintes dans leur santé et menacées d’invalidité, en particulier les personnes jeunes souffrant de handicaps psychiques. Les hypothèses formulées doivent être évaluées et vérifiées. Il faut donc poursuivre les programmes de recherches, affiner les hypothèses et mettre en évidence les corrélations entre divers facteurs et le handicap.
Prévenir. L’accent doit être mis sur la prévention : information du public et des entreprises, conseils et recommandations. Si les entreprises sont en général attentives à la prévention des accidents, les maladies professionnelles sont insuffisamment prises en compte. « En 2001, 3700 cas de maladies ont été reconnus comme maladies professionnelles. Et si, en moyenne suisse, un employé à plein temps sur 13 a été victime d’un accident professionnel, ce rapport passe à 1 sur 1000 dès lors que l’on parle de maladie professionnelle. La raison principale de la fréquence peu élevée des maladies professionnelles tient au fait que les critères retenus par les assurances pour les reconnaître en tant que telles sont très sévères. (…) Les maladies professionnelles définies dans le droit des assurances ne représentent dès lors qu’une infime partie de toutes les maladie dues et associées au travail. »* Un grand effort reste à faire. Une étude de l’OFS, par exemple, met en évidence les conséquences du stress professionnel. Tant que les maladies professionnelles ne seront pas suffisamment reconnues, la prévention restera inefficace et elles seront une cause importante d’invalidité. (*Eures.ch)
Prendre en charge rapidement. Prendre en charge les personnes menacées d’invalidité dès que le problème de santé est reconnu, évite la désocialisation, favorise le maintien en emploi et la réinsertion professionnelle et ne peut être que positif pour les personnes concernées. Cette priorité de la 5ème révision doit être saluée comme l’un des éléments les plus importants de prévention de l’invalidité. Elle est unanimement soutenue.
Agir sur le marché du travail. L’invalidité se définit en fonction de l’état de santé et de la capacité de gain. Le marché du travail joue donc un rôle dans l’accroissement des cas d’invalidité. On peut en particulier poser les hypothèses suivantes :
– L’augmentation des rythmes de production et des exigences professionnelles exclut de plus en plus de personnes du monde du travail.
– Les entreprises, soumises à des contraintes financières, cherchent à se séparer de leurs employés en difficultés.
– Les personnes atteintes dans leur santé ne peuvent trouver un emploi correspondant à leur capacité résiduelle de travail. Les postes à temps partiel sont trop peu nombreux.
– Les emplois simples manquent d’une manière générale
A cela s’ajoute que les autres institutions, telles que l’assurance chômage ou l’action sociale, font la même démarche que l’AI et tentent de placer les personnes dont elles s’occupent. En conséquence, il est difficile de maintenir les personnes menacées à leur place ou de leur en trouver une autre. La participation des employeurs est indispensable à la réussite des programmes de réinsertion. Il faut donc prévoir des mesures incitatives, autant pour les employeurs que pour les personnes handicapées. Cependant, de toute évidence, cela ne suffira pas. Si l’on veut employer plus de personnes handicapées, il faudra créer des places ad hoc.
Financer. L’AI est régulièrement déficitaire depuis de nombreuses années. Les taux de cotisation sont restés les mêmes, alors que la société évolue et que les besoins changent. La dette atteindra 9 à 10 milliards de francs fin 2006.
– Le désendettement de l’AI doit être réglé par un financement particulier limité dans le temps. La part fédérale des réserves d’or de la BNS (environ 7 milliards) doit être attribuée à l’AI. Cependant cette somme n’est pas suffisante. Il faut donc également, soit relever les cotisations salariales de 0,1% (300 millions par an jusqu’en 2014 environ), soit établir un « impôt de solidarité », du type de celui qui avait été mis en place pour l’AC, prélevé sur les hauts salaires et limité dans le temps (1% sur la part des salaires de plus de 100’000.- rapporterait environ 262 millions de francs par an.)
– En outre, pour pallier le déficit de fonctionnement de l’AI, il faut trouver de nouvelles sources de revenus, malgré les économies prévues dans le cadre des 4ème et 5ème révisions. Si la moitié du déficit peut être épongée par le désendettement et les mesures d’économie, pour l’autre moitié, il est nécessaire de prévoir des rentrées supplémentaires, correspondant à 0,4 point de TVA ou pourcent de cotisation salariale, pour autant que l’on maintienne l’effort des pouvoirs publics à son niveau actuel (6,12 milliards pour la Confédération.) L’augmentation du taux de cotisation salariale est le système le plus cohérent et pourrait avoir plus de chance d’aboutir qu’une hausse de la TVA, celle-ci ayant déjà été refusée récemment en votations populaires.
3. Frein à l’augmentation du nombre de
nouvelles rentes AI
– Détection précoce et suivi (DPS) des personnes en incapacité de travail pour cause de maladie en vue de leur réinsertion rapide
Commentaire
La prise en compte précoce de la menace d’invalidité est très positive. La volonté de maintenir les personnes menacées d’invalidité à leur place de travail est bénéfique socialement et médicalement. Les experts s’accordent sur le fait que plus on intervient tôt, plus les chances de se réintégrer dans le monde du travail sont grandes. La prise en charge précoce et le suivi par un Centre de détection précoce et de suivi (CDPS) sont des éléments importants. Cette mesure est cependant plus efficace si le CDPS peut éviter que les personnes concernées ne perdent leur emploi. Il faut donc prévoir des contacts institutionnels, des incitations ou des aides pour que l’employeur garde la personne menacée d’invalidité à sa place de travail.
Les contacts entre les CDPS et les employeurs doivent être réguliers et permettre une information de qualité en matière de handicap et de possibilités de maintien en emploi de personnes en difficultés. Les CDPS peuvent intervenir pour fournir les indications utiles au réaménagement des conditions de travail (déplacement de la personne dans l’entreprise, modification du temps de travail, compléments de formation, rétributions, parrainages et mentorages, etc.) Les attributions des CDPS doivent être définies de manière à faciliter la coordination avec les autres instruments de politique sociale et de réinsertion professionnelle.
Délais d’annonce : selon les personnes concernées, il paraît raisonnable de prévoir un délai d’environ 100 jours d’absence, consécutifs ou dispersés, avant d’annoncer une personne au CDPS. On peut souhaiter que le signalement se fasse d’entente entre l’employeur et l’employé.
Propositions
En ce qui concerne la prise en charge par les CDPS, une remarque : lorsqu’une personne perd sa place de travail au cours de l’enquête menée par le CDPS, ce dernier la dirige vers l’organe compétent de l’AC. Ceci suppose une formation adéquate des employés de l’AC, de manière à ce qu’ils puissent estimer les problèmes de santé et les risques encourus par la personne menacée de handicap, lorsqu’ils évaluent sa capacité de travail et lui proposent une place. Ceci est d’autant plus important que l’AC doit également prendre en charge les personnes handicapées, réinsérées sur le marché du travail, qui perdent ensuite leur emploi.
On pourrait se demander si la réinsertion professionnelle des personnes handicapées ne devrait pas être, d’une manière générale, confiée aux ORP. Ils disposent en effet des réseaux nécessaires au placement et la réunion de toutes les mesures de réinsertion dans les ORP favoriserait les synergies nécessaires au traitement de dossiers complexes.
– Mesures de réinsertion
Commentaire
Le fait que la personne handicapée puisse, avec cette révision, acquérir une formation meilleure, que celle qu’elle avait auparavant, est très positif. Les personnes handicapées ont souvent de la peine à trouver un emploi. Leur permettre de pallier leur handicap en leur donnant une bonne formation est un élément important de la politique de réintégration. Ces formations doivent être ouvertes à toutes les personnes handicapées, y compris celles qui n’avaient aucune formation auparavant.
L’obligation de participer à des programmes de réintégration est acceptable. Cela peut même être bénéfique pour les personnes qui traversent une période difficile, n’ont plus confiance en elles ou doivent réapprendre à vivre au travail. Cependant, leur état de santé doit être évalué avec soin, de manière à éviter de le péjorer par la participation à des programmes inadaptés au handicap.
De nombreuses personnes handicapées ont une bonne formation et des capacités professionnelles de haut niveau. Il n’est pas acceptable qu’elles soient contraintes de participer à des programmes de réinsertion professionnelle qui ne tiennent pas compte de leurs compétences. Il serait judicieux d’appliquer ici les mêmes principes que dans le cas du chômage et d’éviter une déqualification de la personne handicapée, si celle-ci n’est pas due au handicap lui-même et à la perte de fonctions indispensables à l’activité antérieure.
Propositions
Se pose la question de la suffisance de places de travail pour occuper ces personnes. Actuellement, le marché de travail est saturé. C’est la raison pour laquelle les personnes en difficultés en sont de plus en plus exclues. Leur demander de travailler n’est possible que si les pouvoirs publics mettent en place des mesures d’incitations pour les employeurs et créent, en partie du moins, les places adaptées manquantes. Une réflexion doit être menée sur certains modèles existant en Suisse ou à l’étranger, qui pourraient être testés ou étendus à tous les cantons.
L’entreprise de transition : c’est une entreprise subventionnée par l’Etat, qui prend en charge les personnes invalides ou menacées d’invalidité, fait une évaluation de leurs compétences, leur donne une formation complémentaire et est chargée de les réintégrer dans l’économie. L’entreprise subventionnée reste l’employeuse, jusqu’à ce que la nouvelle entreprise soit prête à engager la personne. Pour inciter l’entreprise de transition à placer ses employés, on lui verse une prime pour chaque personne réintégrée. Dans le système actuel, l’incitation est souvent négative, car les ateliers ont avantage à garder leurs ouvriers les plus performants pour être concurrentiels. Il s’agit de transformer une incitation négative en incitation positive.
L’atelier protégé en entreprise : ce sont des groupes de personnes qui sont employées par une entreprise et travaillent sur le site de l’entreprise, mais dont la prise en charge administrative, l’accompagnement et le salaire sont assurés par un atelier protégé ou une entreprise de transition. C’est une première phase dans l’intégration des personnes handicapées dans l’entreprise. Dans le canton de Neuchâtel, deux entreprises ont créé de tels ateliers : PMP et Felco.
Le modèle du bureau de placement : c’est un système de réinsertion qui diminue au maximum les risques de l’entreprise et ses charges administratives. Ces deux éléments sont souvent cités par les employeurs comme les principaux freins à l’engagement de personnes handicapées. Il s’agit de mettre des personnes à disposition des entreprises, sans qu’elles ne doivent les engager immédiatement : la personne reste employée de l’agence, qui assume les charges administratives, gère les contrats, verse les salaires, assume la LPP et facture le tout à l’entreprise, jusqu’à ce que celle-ci soit prête à engager la personne définitivement.
L’organisme de médiation. Les employeurs qui sont prêts à garder ou à engager des personnes exposées à des difficultés, doivent pouvoir s’adresser à un organisme de médiation pour faciliter l’intégration dans l’entreprise et assurer le suivi jusqu’à ce que ces personnes trouvent une certaine stabilité. La plupart des employeurs n’ont ni le temps, ni la formation adéquate pour s’occuper d’un employé en difficultés.
L’organe d’information (mentorage). Les nouveaux employés peuvent être accompagnés dans l’entreprise par un spécialiste du handicap concerné, qui informe les employés sur le handicap et répond aux questions. Il provient des associations d’aide ou d’entraide du handicap et permet une meilleure compréhension et une meilleure acceptation des difficultés du nouvel employé.
Le parrainage. Ce sont des employés de l’entreprise, qui sont d’accord d’accompagner la personne handicapée au début de son intégration et de faciliter les contacts avec les autres employés. En France, les parrains reçoivent une formation de deux jours sur le handicap et servent de médiateurs dans la vie quotidienne.
Les mesures incitatives financières pour les employeurs peuvent être un complément utile (prise en charge du premier salaire, déductions fiscales, réduction de la prime AI employeur pour les entreprises qui s’engagent particulièrement, etc.). Ces mesures sont appliquées dans certains pays. Elles peuvent être discutées.
Les mesures incitatives financières pour les employés : actuellement les salaires qui sont offerts par les ateliers protégés sont souvent extrêmement bas et ne sont pas incitatifs. Verser une rétribution plus intéressante rendrait le travail plus attractif. Cependant, il y a actuellement un frein : la personne dont le salaire est trop élevé risque de perdre sa rente et de se retrouver dans une situation très précaire si son état de santé se dégrade.
Le système des quotas : plusieurs pays européens (France, Italie, Grèce, Espagne) ont introduit un système de quotas. Depuis 1987, en France, les entreprises de plus de 20 employés doivent engager 6% de personnes handicapées. Si elles ne peuvent le faire, elles versent une somme déterminée à un fonds qui finance la création de places de travail et des mesures de réinsertion.
Commentaire
Le financement de cette première période de réintégration par les indemnités journalières, comme cela est préconisé dans le message, est une bonne approche. Cela incite la personne menacée d’invalidité à participer à sa réintégration et à accomplir une nouvelle formation de qualité. Il faut cependant préserver la possibilité, quand une personne s’engage dans une formation de longue durée, de prolonger les mesures d’intégration au-delà de deux ans, de manière à lui permettre de terminer les études entamées. Il faut aussi que la formation soit ouverte à tous et à toutes, même à ceux et celles qui n’ont pas de formation de base.
Il y a cependant un problème en ce qui concerne la suspension éventuelle des indemnités, en cas de refus de coopérer. L’AI n’est pas dans la même situation que l’AC. Dans nombre de maladies psychiques, la coopération du patient n’est pas acquise (pathologies sociales, marginalités, dépressions, troubles du comportement, phobies, etc.). Le manque de collaboration est parfois un symptôme de la maladie. Il peut être passager, dû au fait que la personne n’accepte pas sa maladie et ne veut pas se soigner. Il arrive aussi que des jeunes qui viennent de terminer leur formation n’aient plus le courage d’en entreprendre une nouvelle. Une prise en charge rapide permet cependant en général d’éviter une évolution vers la chronicité.
Faut-il exclure ces personnes des programmes de réintégration, diminuer leur rente AI, les renvoyer à l’aide sociale ? La réponse n’est pas sans conséquences, car il s’agit là d’un pan important des pathologies que nous rencontrons aujourd’hui. La notion de coopération du patient doit être définie avec une certaine souplesse. Une sanction ne doit être prise que si le patient « peut » parfaitement collaborer, mais ne « veut » pas, pour des raisons incompréhensibles, sans quoi l’incitation au travail pourrait se transformer en naufrage social.
En outre, qu’advient-il des personnes dont l’indemnité journalière est suspendue ? Comment leur minimum vital est-il assuré ? Dans quelles conditions peuvent-elles obtenir une rente AI si nécessaire ? Enfin, qu’advient-il des personnes qui n’ont pas droit à ces mesures d’intégration ? Par exemple en cas d’incapacité de gain de moins de 30% ?
– Evaluation de l’incapacité de travail confiée à des médecins de l’AI
Commentaire
L’évaluation par des médecins de l’AI a l’avantage d’harmoniser les critères d’octroi de rentes dans l’ensemble de la Suisse. Actuellement, la pratique est assez différente d’un canton à l’autre.
Il est cependant important que le médecin traitant, qui est la personne qui connaît le mieux le malade, continue d’intervenir, ne serait-ce qu’à titre consultatif, dans la procédure, de manière à éviter qu’un cas ne soit jugé sans en connaître l’historique. C’est une précaution importante, en particulier en matière de maladies psychiques ou dégénératives, où l’état du patient peu varier d’un jour à l’autre. Il faut donc déterminer quand et de quelle manière le médecin traitant peut faire valoir son avis dans le cadre de la procédure.
Actuellement, nombre de médecins se plaignent du peu de reconnaissance qui leur est accordé par les instances de l’AI. Ils se heurtent de plus en plus souvent à des refus de rentes, pour des patients dont ils estiment qu’ils sont dans des situations graves. Le problème est particulièrement aigu dans le cas du handicap psychique.
– Droit aux prestations de l’AI au plus tôt dès le dépôt de la demande
Commentaire
Cette mesure incite les personnes menacées d’invalidité à s’annoncer aussi rapidement que possible. La détection précoce et les chances de réinsertion en sont améliorées.
– Relèvement de la durée minimale de cotisations
Commentaire
L’efficacité économique de cette mesure est très faible, car elle ne concerne que peu de personnes. Les ressortissants de l’UE/AELE ne sont pas touchés, car ils sont couverts par les accords bilatéraux. Les conventions signées avec les autres pays peuvent peut-être être renégociées. Les personnes en détresse doivent de toute façon être prise en charge d’une manière ou d’une autre. On peut douter que le bénéfice que l’on en tire en vaille la peine.
4. Correction des incitations négatives
– Harmonisation du système d’indemnités journalières de l’AI avec celui de l’assurance chômage et suppression du minimum garanti
Commentaire
La question est délicate. Il ne faut pas perdre de vue que le handicap n’est pas le chômage et qu’une personne handicapée doit faire face à des frais qu’une personne au chômage n’a pas. Le chômage a tendance à diminuer les frais (transports pour se rendre au travail, cantine, etc.), tandis que l’invalidité a tendance à les augmenter (soins, médicaments, etc.)
Il vaut mieux se référer aux assurances accident ou maladie, qui prévoient une indemnité journalière de 80% du gain assuré, sans quoi, le patient n’est pas incité à s’inscrire tôt auprès de l’assurance invalidité. Il a avantage à conserver ses indemnités journalières accident ou maladie en principe plus élevées.
La suppression du minimum garanti pose un problème difficile aux personnes qui s’occupent de leur foyer et de leurs enfants. Elles fournissent un travail non rétribué, mais dont la valeur de remplacement est élevée. Elles ne peuvent avoir de mesures de réadaptation, ni d’indemnités journalières de l’AI. L’allocation pour frais de garde ne couvre qu’une partie des frais réels. Il en va de même des assurés qui réduisent leur taux d’emploi à la suite d’une détérioration de leur état de santé.
– Suppression des diminutions globales de revenu en cas d’augmentation de l’activité lucrative
Commentaire
Cette mesure supprime un frein à l’emploi des personnes handicapées en leur permettant de travailler, sans risquer de perdre leur rente et de se retrouver dans une situation difficile en cas de progression de leur maladie ou de rechute. La rente est adaptée au salaire et prend le relais du salaire si celui-ci disparaît. On pourrait imaginer par exemple un échelonnement plus fin de la rente (de 10% en 10%)
– Suppression du supplément de carrière
Commentaire
Diminution de prestations pour les assurés les plus âgés. Calculer le taux d’invalidité sur la base du dernier revenu effectif péjore la situation des personnes devenues handicapées tôt. De très nombreux jeunes, handicapés de naissance ou précocement, doivent recourir aux PC pour atteindre le minimum vital. Le supplément de carrière n’est pas suffisamment attractif pour les encourager à ne pas se réinsérer.
5. Mesures d’économies
– Transfert des mesures médicales de réadaptation professionnelle par l’assurance-maladie
Commentaire
Il s’agit là, non d’une économie, mais d’un transfert de l’AI vers la LAMal. Il n’est pas sûr que la simplification de la procédure permettra de faire beaucoup d’économies. En revanche, cela représente quelques désavantages pour les assurés. La LAMal est moins généreuse que l’AI. Il y a des franchises et des participations, des limitations de thérapies, etc. Cela péjore la situation des enfants qui doivent suivre des physiothérapies ou des psychothérapies de longue durée. Priver des enfants de ces traitements risque fort d’accroître leurs difficultés à long terme et de rendre leur handicap chronique.
– Suppression des rentes complémentaires en cours
Commentaire
Il s’agit d’une diminution des prestations pour les couples mariés. Les rentes complémentaires nouvelles ont déjà été supprimées dans la 4ème révision. On supprimerait ici les rentes en cours. C’est une diminution du budget des familles et des couples. Vu les budgets souvent très précaires de ces familles, cette mesure ne devrait être prise qu’avec beaucoup de prudence et de manière échelonnée, en tenant compte de l’âge des personnes concernées.
Pour Forum Handicap
Gisèle Ory
Présidente
22 juin 2005