Euro 2008

Je ne veux pas revenir sur la question de savoir si cet événement aura un effet positif ou négatif sur notre pays, si les avantages à en attendre seront plus ou moins élevés que les coûts que nous devrons assumer. A l’heure actuelle, nous ne le savons pas. Il faudra faire un bilan, après, mais il faudra le faire, car nous devons savoir ce que coûte une telle organisation et ce qu’elle rapporte.

 

En attendant, nous avons obtenu l’Euro 2008, avec l’Autriche. Tant mieux. Nous pourrons mettre en évidence la qualité de nos infrastructures et notre culture du tourisme. Et après tout, après l’échec immérité de la candidature olympique « Sion 2006 », la Suisse méritait bien son grand événement sportif.

 

Nous avons déjà longuement évoqué les questions d’organisation et l’explosion des coûts entre les deux messages de la Confédération. Je n’y reviendrai pas.

 

Notre équipe est bonne. Elle est composée de jeunes talents, présentant un jeu attrayant, au bénéfice d’un parcours de qualification éblouissant et porteur d’un espoir fou : aller jusqu’en finale. Je veux bien être aussi optimiste que notre conseiller fédéral avant le match contre la Chine !…

 

Nous allons dépenser quelques dizaines de millions pour la sécurité autour des stades. Nous aurons ainsi le sentiment que les joueurs, les supporters et les biens seront protégés. En réalité, les frais engagés sont considérables et l’on est en droit de se demander, d’une part s’ils sont bien investis et d’autre part s’ils doivent être assumés par la collectivité.

 

Les plus grands dangers, ce ne sont pas les supporters qui les courent, ce sont les jeunes femmes d’Europe de l’Est et du Brésil, que l’on fera venir en Suisse et en Autriche pour répondre à l’accroissement de la demande de plaisirs rapides. Beaucoup ne seront pas consentantes. Elles auront été trompées sur les buts de leur voyage. Elles seront menacées, contraintes, séquestrées, brutalisées. Certaines devront accepter des relations non protégées. Combien y laisseront leur vie ? Certainement beaucoup plus que des hooligans. Que fait-on pour elles ? Le Conseil national a refusé la proposition de Barbara Häring, faisant preuve de beaucoup d’indifférence envers la souffrance de ces femmes.

 

Devant la Commission du Conseil des Etats. M. le Conseiller fédéral Samuel Schmid a promis de traiter cette question. Nous y resterons attentives et nous voulons des rapports réguliers nous montrant les mesures prises et leur effet.

 

L’office fédéral de la police estime que ce sont entre 1500 et 3000 femmes qui sont amenées chaque année en Suisse contre leur gré ou à l’aide de fausses promesses. Malgré cela, on n’enregistre que 30 plaintes par année et 1,4 condamnation. On peut dire qu’actuellement, nous frisons le sommet de l’inefficacité. Or l’Euro 2008 va accroître ce phénomène. Combien seront-elles à risquer leur vie chaque jour ? Il me paraît urgent de nous en préoccuper très sérieusement.

 

Il faut collaborer avec l’Autriche. Il faut des campagnes de prévention dans les pays d’origine. Il faut des campagnes d’information et de mise en garde à l’intention des clients potentiels. Il faut un numéro d’appel pour les victimes. Il faut des centres d’accueil, un conseil psychologique, social et juridique. Il faut aussi que les jeunes filles puissent rester en Suisse jusqu’au moment du procès et que, si nécessaire, elles soient protégées.

 

Le trafic d’êtres humains est le troisième trafic illégal le plus lucratif au monde, après les armes et la drogue. Malheureusement, ce genre de trafic est favorisé par la réunion en un seul endroit d’une importante clientèle potentielle.

 

L’Allemagne a vu l’offre de plaisirs tarifés exploser en raison du Mundial. Des bâtiments spécifiquement destinés à recevoir des supporters accompagnés de jeunes filles ont été construits non loin des stades. Les services de police ont constaté une intensification des activités criminelles menées par les réseaux de traite des êtres humains. L’Allemagne a été rattrapée par son imprévoyance et l’image de sa grande fête du foot est maintenant entachée. Nous ne voulons pas cela pour l’Euro !

 

Condamner ne suffit pas. Il faut agir. Tolérer l’esclavage et l’exploitation, c’est en être complice. Ne refaisons pas la même expérience et prenons dès maintenant les choses en mains. C’est le principal problème de sécurité auquel nous serons confrontés, sécurité des femmes, il est vrai, et non pas des supporters ou des biens, mais un problème de sécurité grave. Si on dépense quelques dizaines de millions pour les hooligans, combien devrait-on dépenser pour protéger les femmes ?

Minorité 10,5 millions pour les villes hôtes.

 

Les moyens dévolus à la sécurité sont considérables, six fois plus élevés que prévu à en croire les estimations avancées par la Conférence des gouvernements cantonaux. Un constat qui m’incite à vous faire part de trois préoccupations, allant au-delà des problématiques strictement économiques et financières posées par l’organisation de l’Eurofoot 2008 :

 

Nous avons encore tous en tête les déplorables et tristes événements survenus à Bâle en mai dernier, à l’occasion de la dernière journée du championnat suisse de football. Personne ne conteste la nécessité de lutter contre le hooliganisme. Mais ne serait-ce pas souhaitable de prendre en considération des aspect préventifs, comme le font plusieurs clubs suisses et européens qui encadrent leurs supporters avec des éducateurs de rues ? Ce sont des mesures souvent plus efficaces et moins onéreuses que la stricte répression.

 

On peut s’interroger aussi sur la clé de répartition des coûts de la sécurité entre les villes hôtes, les cantons et la Confédération. Le coût est très élevé pour les villes organisatrices, qui nourrissent quelques doutes légitimes quant aux retombées économiques réelles de l’Eurofoot. La lettre qu’elles nous ont envoyée la semaine passée est sans équivoque. Elles comptaient sur un forfait de 17 millions. Le Conseil national leur a accordé une aide de 10,5 millions pour leur frais de sécurité. Les deux commissions du Conseil des Etats y ont renoncé.

 

Les villes hôtes ne sont pas satisfaites de la répartition qui a été prévue au départ. La population n’est pas acquise et plusieurs craignent des référendums. Or un refus de la population de l’une des villes mettrait l’organisation de l’Eurofoot en difficulté.

 

Du fait de la présence de l’Euro sur leur territoire, les sites d’accueil, villes et cantons, devront faire face à des dépenses extraordinaires. Ils investiront en particulier dans l’image touristique de la Suisse en général et n’en recueilleront qu’une partie des bénéfices. Il est évidemment difficile de chiffrer une telle répartition des retombées. L’étude présentée démontre que les villes hôtes devront assumer la moitié des frais, mais n’auront que le quart des bénéfices, en particulier dans le domaine du tourisme hôtelier. Les résultats de cette étude paraissent plausibles et il y a fort à parier que ce sont les lieux les plus touristiques qui profitent le plus de cette offensive publicitaire.

 

Le problème de fonds, en réalité, renvoie tout à la fois aux qualités et aux imperfections de notre fédéralisme. L’Eurofoot est un événement de portée nationale et même plus, européenne et internationale: il nous paraît donc logique, dans le cas présent, que la Confédération s’implique davantage, financièrement parlant, que les cantons et les villes hôtes.  Ces villes et ces cantons, héritant sans doute avec bonheur, mais bien malgré eux, la tâche délicate d’organiser la tenue de ces rencontres, devront supporter une bonne part de l’explosion des coûts de sécurité. A nos yeux, ce n’est ps équitable.  Cette explosion des coûts n’est pas tant liée aux critères très stricts de sécurité de la FIFA et de l’UEFA, mais aussi au contexte des attentats du 11 septembre, et à la crainte qu’à l’occasion de l’Euro 2008, les intérêts et la sécurité de notre pays ne soient mis en péril par des actes terroristes.  Or, précisément, il est normal que ce type précis de menace soit supporté par la Confédération et par le Département de la sécurité.

 

 

 

Je vous propose donc de soutenir la proposition de la minorité et de faire un effort en faveur des villes hôtes et de nous montrer solidaires à leur égar

 

 

 

 

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