Crédit-cadre 2007-2011
Les gens du voyage suisses forment une communauté estimée à environ 30 000 personnes, la plupart sont des Yéniches. Pendant l’été, les gens du voyage parcourent notre pays et stationnent sur les aires de transit. Ce mode de vie fait partie de leur existence économique. Ils voyagent pour exercer une activité lucrative indépendante.
Si certains sont devenus sédentaires, c’est en partie à cause de l’opération « Enfants de la grand-route », dans le cadre de laquelle plus de 600 enfants ont été enlevés à leurs parents et sédentarisés au nom de la protection de l’enfance. Ces tristes souvenirs ont été au centre des préoccupations ces dernières années, que ce soit dans le cadre des réparations accordées aux victimes de l’opération «Enfants de la grand-route» ou dans celui de la recherche historique. Ce travail de mémoire doit être poursuivi.
Au-delà de ce passé douloureux, il y a la gestion de nos relations avec cette minorité au quotidien, le présent et le futur, ici et maintenant : il y a les problèmes d’aménagement de terrains d’accueil, de coexistence des communautés, d’information des autorités et du grand public. Il s’agit de processus en cours, de dynamiques à poursuivre, pour continuer à mieux intégrer cette minorité. Ce sont des tâches importantes, qui justifient l’existence même de la Fondation « gens du voyage suisses » et lui confèrent un rôle déterminant. Cette mission, Chers Collègues, renvoie aussi aux engagements juridiques et constitutionnels du pays.
Nous l’ignorons parfois encore, mais les gens du voyage en tant que groupe de population possédant la nationalité suisse et ayant un mode de vie et une culture non sédentaires ont le statut de minorité nationale protégée. A l’heure actuelle, il demeure avéré que le droit en vigueur contient encore un certain nombre de discriminations indirectes à l’égard de cette minorité nationale, notamment dans le domaine de l’aménagement du territoire et de la police des constructions et dans celui de la police du commerce et de la scolarisation obligatoire.
Pour rappel, le 28 mars 2003, le Tribunal fédéral (ATF 129 II 321, considérant 3.2.) insistait sur le fait que « le droit des gens du voyage à la préservation de leur identité est garanti par la Constitution et par le droit international et que les besoins des gens du voyage doivent être pris en compte dans le cadre de la réglementation sur l’aménagement du territoire. »
Or, les problèmes, à l’heure actuelle, ne sont de loin pas tous résolus. Nous avons certes fait des progrès au niveau du droit, en reconnaissant les gens du voyage comme une minorité culturelle et en résolvant la question des patentes au niveau suisse. Cependant, au niveau social, nous n’avons pas encore de solution. Nous le constatons, quand nous considérons que l’on ferme plus de places de transit que l’on en ouvre.
Nous avons en fait deux problèmes :
D’une part, un problème d’argent. Les communes ne sont pas très motivées quand il faut dépenser de l’argent pour aménager une place et l’entretenir, sans rien en retirer en impôts. Ce n’est pas un investissement rentable.
D’autre part, nous avons un problème d’image. L’image des gens du voyage dans la population est assez négative. Il y a au mieux méfiance, au pire crainte.
Si nous voulons améliorer la situation, trouver et aménager ces fameuses places, il est nécessaire que la Fondation puisse encourager les communes financièrement. Il faut aussi qu’elle puisse investir dans l’image des gens du voyage, informer la population sur le nomadisme en Suisse aujourd’hui, car seule une bonne information pourra venir à bout des réticences actuelles.
Pour toutes ces raisons, Chers Collègues, face à la nécessité de remplir des engagements internationaux, de faire face à des problèmes encore non résolus, je vous appelle non seulement à renouveler le crédit-cadre alloué à la Fondation « Assurer l’avenir des gens du voyage suisses », mais à donner à la fondation les moyens qui lui sont nécessaires pour qu’elle puisse atteindre ses objectifs, permettre l’intégration, et non pas l’assimilation, de cette culture dans notre pays et améliorer les conditions de vie des gens du voyage. Cela serait bénéfique pour tout le monde, pour les gens du voyage, comme pour les sédentaires que nous sommes.
Je vous remercie de votre attention.