Qu’est-ce que le Système d’échanges local?

Actuellement, avec la mondialisation, les acheteurs ne connaissent pas les producteurs et ils sont souvent très loin les uns des autres. Il n’y a pas de contact entre celui qui fabrique un objet ou qui cultive un produit alimentaire et celui qui l’achète ou le consomme.

 

Par exemple, les bananes que vous trouvez à la Migros ou le café que vous achetez aux Magasins du Monde, ont été produits à l’autre bout du monde, probablement en Amérique du Sud et vous ne connaissez pas l’agriculteur qui les a produit.

 

Et souvent aussi, vous ne connaissez pas les gens qui habitent votre quartier ou votre ville et que vous pouvez croiser à la poste ou dans la rue.

 

 

Les buts

 

Eh bien, le Système d’échanges local a pour but premier de recréer ces liens. Il met en relations les personnes qui proposent des services ou vendent des objets dans votre ville, à côté de chez vous et celles qui veulent les acheter. Avec le Système d’échanges local, vous achetez les pommes de l’agriculteur de La Chaux-de-Fonds, vous proposez vos services aux personnes de La Chaux-de-Fonds.

 

Le deuxième but du Système d’échanges local, c’est de redonner un pouvoir d’achat à des personnes qui n’ont pas d’argent ou que très peu d’argent. Il n’est pas nécessaire d’être pauvre pour faire partie du SEL, mais au SEL, le fait d’être pauvre n’est pas un problème, parce que vous ne payez pas les objets ou les services que vous achetez en francs, mais vous les payez en monnaie locale.

 

 

La monnaie locale

 

Le SEL a créé sa propre monnaie et grâce à sa propre monnaie, il peut remplir les deux buts dont je viens de parler. Vous êtes obligés d’acheter sur place, à des gens que vous connaissez, puisque vous payez en monnaie locale. Vous pouvez acheter, même si vous n’avez pas d’argent, parce que vous payez en monnaie locale.

 

A La Chaux-de-Fonds, la monnaie locale s’appelle le picaillon.

 

 

Comment ça fonctionne ?

 

Le SEL est une association. Vous pouvez en être membre simplement en vous inscrivant. Pour vous inscrire, vous devez donner votre nom, votre adresse et votre numéro de téléphone.

 

Dès que vous êtes inscrit, vous êtes membre de l’Association SEL. Vous payez une cotisation annuelle de 10.- qui sert à couvrir les frais d’impression et d’envoi du catalogue.

 

Le SEL vous remet alors les statuts de l’association et le règlement d’utilisation des picaillons. Vous recevez également un numéro de membre et un catalogue de tout ce que vous pouvez acheter dans le cadre de l’association. C’est en somme un peu comme un catalogue de vente par correspondance.

Vous recevez aussi la liste des membres de l’association avec les numéros de chaque membre et leur numéro de téléphone.

Vous recevez enfin un carnet de chèques libellé en picaillons. C’est votre portemonnaie en somme.

 

Le SEL vous ouvre aussi un compte à votre nom dans sa banque et dès ce moment, vous pouvez acheter et vendre des objets et des services que vous payez en picaillons. La banque comptabilise tous vos échanges et tient votre compte à jour. Elle a pour cela un programme informatique.

 

Vous pouvez remplir votre propre liste d’offres et de demandes, où vous mettez ce que vous aimeriez obtenir comme objets et comme services et ce que vous êtes prêts à donner et vous l’envoyez au SEL, qui la publiera dans le prochain catalogue.

 

Le SEL n’est pas un troc ! Vous ne devez pas donner automatiquement quelque chose à la personne qui vous rend un service ou qui vous donne quelque chose.  Ce n’est pas un troc, parce que vous payez ce que vous achetez.

 

 

Exemples

 

Je vous donne quelques exemples pratiques :

 

Vous ouvrez le catalogue et vous voyez que quelqu’un propose de vendre des confitures. Justement, vous aimeriez des confitures ! Vous voyez à côté de l’offre « confitures », qu’il y a un numéro, c’est le numéro de membre de la personne qui propose des confitures. C’est le 15. Sur la liste des membres, que vous avez reçue, vous voyez que la personne qui correspond au numéro 15 s’appelle Julie et son numéro de téléphone est inscrit.

 

Vous lui téléphonez, vous lui demandez ce qu’elle a comme confiture, vous choisissez deux pots à la framboise. Vous lui demandez de vous les livrer et vous lui proposez un prix pour ces deux pots : 10 picaillons pour les deux pots, 5 picaillons pour la livraison. Elle vous les apporte le lendemain.

 

Vous devez alors remplir un chèque sur votre nouveau chéquier : vous indiquez que vous lui devez 15 picaillons, vous datez, vous signez et vous le lui donnez. Elle l’envoie à la banque et la banque déduit 15 picaillons sur votre compte et crédite 15 picaillons sur le compte de Julie.

 

Une semaine après, Alfred vous téléphone. Il a vu dans le catalogue que vous fabriquez des bijoux en bois et il aimerait en offrir un à sa fille. Vous lui proposez de venir les voir. Il choisit un bracelet. Vous estimez qu’il vaut 50 picaillons. Il est d’accord. Il le prend et remplit un chèque à votre nom pour 50 picaillons. Il vous le donne et vous l’envoyez au SEL qui crédite 50 picaillons sur votre compte et débite 50 picaillons sur le compte d’Alfred.

 

Si vous n’êtes pas d’accord sur les prix, vous pouvez négocier jusqu’à trouver un accord ou évidemment renoncer à l’affaire si vous n’arrivez pas à trouver une entente.

 

Sur votre compte, vous avez été en négatif pendant une semaine, mais ça n’a pas d’importance. Au SEL, c’est permis. Maintenant, vous êtes en positif.

 

Vous pouvez être endetté de 1000 picaillons au maximum. Si vous dépassez cette somme, vous serez encouragés à offrir des services et des objets différents pour tenter d’intéresser le client.

 

 

Précautions…

 

Vous ne pouvez pas dépasser 3000 picaillons d’échanges par trimestre, ceci pour éviter que vous puissiez acheter une voiture en picaillons ou de payer votre loyer en picaillons. C’est aussi une précaution que l’on a prise pour éviter d’être obligés de payer la TVA…

 

Ca paraît rigolo, mais c’est arrivé en France, où les SEL sont très développés et où le fisc s’y est intéressé, parce qu’il a estimé que les SEL étaient un moyen intéressant de détourner les obligations fiscales et les lois sociales sur le travail.

 

Pour éviter cela, on limite les échanges à 3000 picaillons par trimestre et on fait une différence fondamentale entre le travail au SEL et le travail professionnel : au SEL, on n’est jamais obligé de rendre un service, on peut dire non en tout temps. On n’est pas obligé de terminer ce qu’on a commencé et on n’est pas responsable de la bien facture du travail réalisé. Ca veut dire par exemple, que si vous donnez des leçons de guitare ou d’informatique tous les mercredis, vous pouvez arrêter en tout temps sans donner d’autre explication que le fait que vous n’en avez plus envie. De même si vous prenez des leçons.

 

 

Un peu d’histoire

 

Les premiers « Local Exchange Trading Systems », en français, Système d’échanges local (SEL),  sont apparus au Canada dans les années 80. Leurs initiateurs cherchaient une alternative permettant de limiter les dégâts écologiques et sociaux engendrés par la mondialisation économique et financière. Il s’agissait de permettre à tous d’accéder à un certain nombre de services et de valoriser leurs compétences malgré la pauvreté et le chômage.

 

C’est ainsi que sont nées les monnaies locales. Elles s’inscrivent dans la ligne des utopies du 19ème siècle avec les bons de travail de Fourier, Proudhon ou Owen, ou de la « monnaie franche », à intérêt négatif, que Sylvio Gesell avait imaginée dans les années 30.

 

Le premier SEL de France est né  sous l’impulsion de l’Alliance paysans-écologistes-consommateurs d’Ariège. En décembre 1994, 300 personnes adoptent le « grain de sel » comme monnaie locale. Les agriculteurs peuvent écouler leur production sur place. Les chômeurs peuvent acquérir une alimentation de qualité, contre des services rendus. Des personnes à l’assistance depuis longtemps, peuvent valoriser des compétences et retrouvent une vie sociale riche. Les voisins font connaissance et un véritable réseau prend naissance. De nombreux groupes se sont constitués depuis.  Il en existe plus de 400 en France, regroupés au sein de l’Association SEL’idaire. Chacun a son organisation propre.  La solidarité s’exerce ainsi de manière concrète, dans la pratique de tous les jours.

 

Principes de solidarité  et de convivialité

Les notions de convivialité et de solidarité sont primordiales dans le Système d’échange local. L’association qui se crée a pour but de favoriser la convivialité et le contact entre ses adhérents. Toute personne qui adhère, vient parce qu’elle s’intéresse à la démarche, mais aussi parce qu’elle y trouve un intérêt personnel. L’association met en contact ses adhérents. Elle propose de nombreuses activités, comme des assemblées, des fêtes, des pique-niques, des visites touristiques, des promenades champignons, etc. C’est pour les membres, un moyen de se rencontrer et de faire connaissance. C’est en faisant connaissance que va se développer la confiance et le respect.

 

Découvrir l’échange, c’est entrer en contact avec la personne du quartier que nous croisons chaque matin dans la rue et à laquelle nous disons simplement bonjour. C’est apprendre à la connaître et découvrir des compétences que nous ignorions, à demander un service et proposer les siens. Proposer ses services c’est aussi prendre conscience que nous avons des compétences et que ces compétences nous pouvons les mettre à disposition des autres et de la collectivité.

 

Contacts

 

L’association dispose d’un site Internet où vous pourrez trouver d’autres renseignements.

www.SEL-Suisse.ch

 

Les premiers SEL suisses sont nés il y a environ 8 ans. Le premier, je pense était celui du Val-de-Ruz, où l’on paie en batz. Il y en a actuellement trois dans le canton de Neuchâtel : celui du Val-de-Ruz, celui de La Chaux-de-Fonds et le SEL du lac à Neuchâtel.

 

Nous espérons bien sûr qu’il s’en crée de nouveaux…

 

Pour le moment, et en l’absence d’un SEL au Locle ou dans le Jura bernois, nous acceptons à La Chaux-de-Fonds des personnes de ces deux régions, dans l’espoir qu’elles pourront à terme créer leur SEL au Locle ou à St-Imier.

 

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