L’Europe et la culture

Mesdames, Messieurs,

 

La première question que nous devons nous poser, c’est : y a-t-il une culture européenne ? Pour répondre à cette question, nous devons nous demander qu’est-ce qui nous distingue en tant qu’Européens des autres cultures, des autres continents.

 

Nous avons en tout cas un héritage commun qui nous vient des grandes civilisations qui se sont développées sur notre continent et l’ont marqué. La Grèce et Rome bien sûr, mais la culture européenne a aussi été profondément marquée par l’ancienne culture celte, puis par le christianisme, dont on voit les traces dans tous les arts, que ce soit l’architecture, la sculpture, la peinture, la littérature, la musique ou le théâtre et le cinéma.

 

Ne sous-estimons pas non plus l’apport de l’Islam, avec lequel l’Europe a toujours été en contact étroit, du judaïsme ou de l’Orient. Ce n’est là qu’une fresque très incomplète, j’en suis consciente. Chacun pourra me dire que d’autres éléments comptent tout autant.

 

L’Europe est en fait un immense carrefour d’échanges de savoirs, de connaissances, qui a toujours été en évolution, en ébullition.

 

La caractéristique de l’Europe, c’est son extraordinaire foisonnement, cette richesse de langues et de cultures, d’apports divers, dont beaucoup sont très anciens ? L’Europe est un vieux continent, berceau de civilisations dont les échanges ont toujours enrichi la réflexion et les découvertes. La Suisse est au centre de ce continent et a été traversée par tous les courants qui l’ont parcouru. Elle en est aussi un résumé, puisqu’elle est un carrefour de langues et de cultures.

 

Comme pour la Suisse, la multiplicité des langues et des cultures est sans doute l’une des plus belles richesses de l’Europe, mais aussi l’une des plus grandes difficultés qu’il faut surmonter pour pouvoir développer le sentiment d’appartenir à la même entité et construire l’Europe politique.

 

 

 

Comment faire cohabiter dans le même espace tant de peuples de langues et de traditions différentes ?  Nous aimerions bien, nous autres Suisses et Suissesses, qui nous efforçons depuis des siècles de vivre ensemble avec nos quatre langues nationales, nous aimerions bien pouvoir donner l’exemple de notre réussite politique et culturelle. Nous avons cohabité, mais nous n’avons pas seulement cohabité, nous avons construit ensemble un Etat moderne, qui fonctionne et qui rencontre même un certain succès politique et économique.

 

Y aurait-il là une source d’inspiration pour l’Europe ? Peut-être, mais je parle avec beaucoup de nuances, car l’organisation d’un état, comme d’un continent, doit découler du génie propre de cet état ou de ce continent et ne peuvent être copiés. Il n’y a pas de recette. Il y a des idées, des expériences, qu’il faut confronter dans un débat au sein des pays concernés et de ce débat doit émerger une organisation culturelle propre à l’Union européenne, une organisation qui ne peut être ni celle de la Suisse, ni celle d’aucun autre état européen.

 

Pourtant on peut bien imaginer que pour que des cultures, des langues, des traditions si différentes puissent vivre ensemble, s’enrichir de leurs échanges et non pas entrer dans un rapport de pouvoir, il faut des institutions qui  respectent les minorités, même celles qui sont les moins fortes démographiquement, et qui soient à même de leur donner une place.

 

En tant que Suisses, nous en sommes conscients. Cela ne va pas de soi. Cela nécessite une attention constante, un respect des institutions, des investissements considérables et des garde-fous. Cela nécessite une délégation de pouvoir au niveau local. Ce n’est pas pour rien que la formation et la culture sont en Suisse du ressort des cantons.

 

Si l’on admet que le foisonnement culturel est la caractéristique de l’Europe, alors notre principal ennemi, c’est l’uniformisation de la culture et là, il y a un grand danger.

 

Arriverons-nous à faire vivre une culture européenne ? Arriverons-nous à résister à la tornade de la mondialisation ? Car au-delà de l’Europe, il y a le monde et la mondialisation de la culture est en marche.

 

CD, baladeurs, e-pod et vidéos sont les supports d’une culture standardisée, qui submerge la planète. Les grandes firmes américaines et japonaises se disputent le marché des très jeunes avec les mêmes produits sur tout le globe.

 

Comment résister ? Cela passe par la formation des jeunes, par la sensibilisation du public et par une politique volontariste :

 

–       Financière, par des aides publiques

–       Géographique, par des manifestations et des structures décentralisées

–       et pratique, en utilisant aussi les nouveaux supports de la culture.

 

La Suisse doit s’intégrer dans ce réseau européen et y apporter sa vision et son expérience. Elle vient de rallier pleinement  le 7ème programme cadre européen de la recherche. C’est un pas considérable vers cette Europe de la recherche, qui ne peut être que profitable à tous.

 

 

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