Monsieur le Président,
Monsieur le Conseiller fédéral,
Chers Collègues,
Les hautes écoles devront relever de nombreux défis dans les années qui viennent et notre souci aujourd’hui devrait être de leur en donner les moyens, les moyens financiers, bien sûr, des moyens qui ne soient pas régulièrement remis en question par des mesures d’économie, qui ne peuvent que freiner la réforme des hautes écoles et fragiliser les projets de recherche qu’elles lancent. Nous devons aussi leur donner des lignes directrices, que le message appelle mesures transversales. Elles sont très importantes et j’aimerais insister sur deux de ces mesures, la promotion de l’égalité des chances et le développement durable.
La promotion de l’égalité des chances faisait déjà partie des réflexions de fonds du message précédent, 2004-2007. C’est maintenant le moment d’en examiner le bilan et de voir ce qui devrait encore être fait.
Egalité des chances entre femmes et hommes
En ce qui concerne l’égalité des chances entre filles et garçon, des progrès légers ont été enregistrés, mais on peut dire qu’on n’en est pas encore et de loin pas à une égalité de fait. Si les étudiantes sont maintenant plus ou moins aussi nombreuses que les étudiants, en revanche, la proportion se dégrade sérieusement quand on parle du corps intermédiaire et plus encore quand il s’agit des professeurs. Il faut donc continuer l’effort et les programmes d’encouragement à la promotion des femmes dans le corps professoral ne doivent en aucun cas être ralentis ou abandonnés. Il faut bien sûr y ajouter des mesures qui permettent aux jeunes mères de ne pas abandonner leur métier pour élever leurs enfants, des aménagements des horaires de cours, des crèches ou des horaires scolaires compatibles avec les études ou la profession.
Egalité des chances entre étudiants de divers milieux
L’égalité des chances entre les étudiants venant de différents milieux doit aussi être améliorée et dans ce domaine, permettez-moi de vous faire part de quelques soucis. L’égalité des chances repose sur l’aide matérielle aux étudiants les plus désargentés.
Or, que constatons-nous à l’heure actuelle ? Le système des bourses est peu développé et n’est pas harmonisé. 80% des étudiants et des étudiantes travaillent pour financer leur formation. Nombreux sont ceux et celles qui renoncent à la poursuivre, parce qu’ils n’arrivent pas à tout mener de front. C’est dommage ! C’est dommage pour les personnes concernées, mais c’est aussi dommage pour le développement scientifique et industriel de notre pays. Nous avons besoin de toutes les compétences. Si des jeunes doivent renoncer à leur formation parce qu’ils ne peuvent la payer, c’est notre avenir que nous prétéritons.
Il faut donc que nous nous préoccupions de la question des bourses et des taxes et que nous cherchions une solution permettant aux jeunes d’étudier sans souci financier. Ce doit être une priorité. Les prêts ne peuvent être une réelle alternative. Dans un pays comme la Suisse, où les gens n’aiment pas s’endetter, ils sont très peu utilisés et ne le seront pas plus à l’avenir. Qui voudrait débuter dans sa vie professionnelle avec une dette de 100’000.- ?
Le fait que 80% des jeunes gagnent leur vie doit aussi nous interpeler. Ca signifie que le modèle de l’étudiant à plein temps est révolu et qu’il faut aujourd’hui se préoccuper d’aménager les études de manière à ce que les jeunes puissent travailler. Il faut des horaires souples, des programmes moins concentrés ou par modules.
Enfin, la répartition des cours entre les hautes écoles a aussi des conséquences. Les étudiants ou les professeurs doivent se déplacer d’un site à l’autre. Il faut donc réfléchir à l’organisation et au financement des transports.
Le développement durable
Le deuxième point que je voudrais aborder, c’est le développement durable. J’avoue que j’ai lu ce message avec une certaine perplexité… On y mentionne le développement durable comme un axe transversal, mais il n’y a malheureusement que quelques mots bien rares en ce qui concerne sa concrétisation. On cite les centres de compétences énergie et mobilité durable et environnement et développement durable du domaine des EPF, mais on ne retrouve plus le développement durable dans les actions stratégiques spécifiques des EPF, des universités ou des HES.
Nous sommes entrés l’année passée dans la décennie de l’ONU pour le développement durable dans l’éducation. Plusieurs pays européens, dont l’Allemagne, ont déjà mis en place des plans d’actions détaillés.
Je suis convaincue que pour faire avancer l’idée du développement durable, il est nécessaire d’introduire ce concept dans l’éducation, et en particulier, dans les hautes écoles, car c’est là que sont les décideurs de demain. Si nous voulons que la nouvelle génération soit consciente des enjeux du développement durable et puisse agir dans ce domaine de manière responsable dès demain, c’est dans les hautes écoles que nous devons commencer notre travail.
Nous apprenons beaucoup par l’exemple, c’est pourquoi nous devons introduire le développement durable, non seulement au niveau de l’enseignement, mais aussi au niveau de la gestion de l’école, gestion environnementale, énergétique, notion d’égalité des chances, etc.
Je note avec intérêt que le Conseil fédéral soutient la décennie de l’ONU, prépare un plan d’action, que de nombreux projets touchant le développement durable sont élaborés au sein du fonds national de la recherche, de la CTI ou des EPF et qu’un chapitre sera consacré à ce sujet dans le monitorage de la formation, afin de rendre les actions en matière de développement durable plus visibles.
L’assurance qualité
J’ajouterais encore un mot sur la question de l’assurance qualité et la reconnaissance des titres au niveau international. On ne peut favoriser mobilité et échanges que si tous les titres distribués sont reconnus dans l’ensemble des pays européens et correspondent aux titres européens. Il faut que les entreprises et les services sachent qui engager et à quoi s’attendre en matière de connaissances. L’assurance qualité et la reconnaissance réciproque des titres sont donc aussi une priorité.
Financement
En ce qui concerne le financement et les fonds attribués à la formation, c’est évidemment une question fondamentale et une augmentation notable est nécessaire si nous voulons assurer une prise en charge correcte des étudiants, qui sont toujours plus nombreux, nous avons vu que les prévisions annoncent pour 2014 une augmentation de 14’000 étudiants dans les universités et de 7000 dans les HES. C’est réjouissant, mais cela nous oblige à de plus grands efforts, si nous voulons rattraper le retard que nous avons dans certains domaines, en sciences humaines par exemple, où il y a beaucoup trop d’étudiants par professeur et si nous voulons assumer notre responsabilité légale face aux cantons et au financement des hautes écoles, avec la prise en considération des nouveaux domaines santé – social et arts dans les hautes écoles spécialisées.
Nous avons aussi, du moins je le crois, l’ambition de nous maintenir au même niveau que les autres pays européens en matière de recherche et de développement, or le taux du personnel de recherche reste à peu près stable en Suisse, pendant qu’il augmente régulièrement, et même fortement, dans certains autres pays, comme la Finlande par exemple. L’Union européenne a la volonté d’augmenter l’effort R et D à 3% du PIB. En Suisse, nous en sommes actuellement à 2,9%, mais cela surtout grâce à l’effort du secteur privé.
Nous avons fait le choix en commission d’une augmentation des crédits FRI de 6%. C’est un minimum. En réalité, nous avons besoin d’une augmentation de 8%, si nous voulons relever les défis qui nous sont proposés et surtout, nous devons éviter de subir à nouveau des mesures d’économies, qui comme nous l’avons vu lors des auditions auxquelles nous avons assisté en commission, ont des conséquences très pénibles sur l’efficacité et la fiabilité du travail des hautes écoles et de la recherche.
Je vous propose donc, Chers Collègues, d’entrer en matière sur ce sujet.