L’AVS et l’art des prévisions…

L’art des prévisions

 

Quand on fait des prévisions, on se fonde toujours sur des hypothèses et évidemment, les résultats sont très différents selon les hypothèses que l’on choisit

 

Par exemple, pour l’AVS, on peut prendre en considération les variables suivantes :

 

  1. Le nombre de naissances par femme et la pyramide des âges
  2. L’importance de l’immigration
  3. La durée moyenne de la vie
  4. La croissance économique

 

Ce sont les principaux éléments, mais pas les seuls qui jouent un rôle sur la santé de l’AVS.

 

D’abord, il faut faire une remarque : la Suisse à moins de problème de vieillissement que les autres pays industrialisés. A l’heure actuelle, nous avons un retraité pour 4 actifs. Il y en aura peut-être un pour 3 en 2020. Ca dépendra essentiellement de la croissance, mais de toute façon, nos prévisions sont bien meilleures que celles des autres pays de l’OCDE.

 

Pascal Couchepin se réfère souvent au vieillissement de la population et en fait une évidence. La durée moyenne de la vie a beaucoup augmenté au 20ème siècle. Elle est actuellement d’un peu plus de 80 ans. Si on extrapole cette courbe, on arrive effectivement à une proportion de personnes âgées très élevée. Cependant, depuis quelques années, cette courbe s’aplatit et il n’est pas vraisemblable que les progrès de la médecine nous permettent d’arriver tous et toutes jusqu’à 100 ans. Les prévisions du DFI, qui choisit des moyennes de 85 et 90 ans sont très optimistes et augmentent considérablement la proportion de retraités par rapport aux actifs.

 

Si l’on se réfère au canton de Neuchâtel, par exemple, la population âgée de plus de 65 ans a diminué ces 5 dernières années, passant de 33’000 à 32’000. Il n’y a donc pas de vieillissement de la population.

 

Les naissances sont peu nombreuses, c’est vrai : 1,2 enfant par femme en moyenne. C’est le cas depuis longtemps. Cela ne suffit pas à renouveler la population. C’est sans doute une indication que nous devrions faire une politique familiale plus incisive, mais cette variable n’est pas déterminante du tout, même si elle est souvent invoquée, car malgré cela, la population suisse augmente…

 

Elle augmente à cause de l’immigration bien sûr. L’immigration est aléatoire, mais dépend de la quantité de travail disponible, donc en grande partie de la croissance. L’immigration présente même un avantage : nous disposons de forces de travail étrangères dont nous ne devons pas payer la formation. Ce sont nos voisins qui paient la formation de notre main d’œuvre… C’est en fait, plus avantageux que de faire des enfants nous-mêmes !

 

En revanche, en ce qui concerne la croissance, le DFI n’est pas optimiste du tout, car il prévoit une croissance économique de 1,5%, puis 0,7%, puis 0,5%. C’est très faible. Beaucoup plus faible que la moyenne européenne et beaucoup plus faible que ce qui nous est annoncé pour cette année. Et surtout, c’est imprévisible à moyen terme et ce n’est pas innocent, car la croissance a une importance déterminante. L’AVS est prélevée sur les salaires. Quand il y a croissance, il y a augmentation de la masse salariale et donc augmentation des revenus de l’AVS.

 

On voit donc que ces hypothèses ont été soigneusement formulées pour pouvoir faire pression sur l’AVS. En réalité, on s’aperçoit que la situation de l’AVS n’est pas précaire.

 

En réalité, l’AVS est actuellement bénéficiaire. En 2006, son bénéfice a été de 2,7 milliards de francs. Le fonds de compensation de l’AVS dispose de liquidités plus que suffisantes, plus de 28 milliards de francs. Selon son président, 15 milliards suffiraient pour faire face aux besoins de l’AVS, 15 milliards, cela représente les coûts de l’AVS pour 6 mois. Ce fonds sert d’ailleurs depuis quelques années à fournir les liquidités nécessaires à l’AI, qui, elle, est gravement déficitaire.

 

Séparation des fonds de compensation

 

Le projet que nous examinerons demain en commission ne permet pas de garantir l’avenir du fonds de compensation de l’AVS et de résoudre les problèmes de l’AI.

 

En réalité, ce projet ne sépare pas vraiment les deux fonds de l’AVS et de l’AI. On créerait effectivement trois fonds distincts pour l’AVS, l’AI et l’APG, mais ces trois fonds auraient encore le même bilan. Quant aux comptes, ils sont déjà séparés aujourd’hui et la transparence est déjà totale. La transparence n’est donc pas un argument. Si à l’’avenir, l’AI devait à nouveau manquer de liquidités, on pourrait encore les emprunter à l’AVS.

 

Pour que les fonds soient vraiment séparés, il faudrait séparer non seulement les comptes, mais aussi les bilans et il faudrait un règlement qui stipule clairement que les dettes futures de l’AI ne devraient plus être financées par des emprunts à l’AVS, mais par un financement propre à l’AI. Quant aux liquidités, dont l’AI a besoin, elles doivent être empruntées à la Confédération, comme pour l’assurance chômage et non pas à l’AVS. Si l’AI emprunte à l’AVS, ce pourrait être l’AVS qui un jour pourrait se trouver en difficulté et manquer de liquidités.

 

Cette proposition de séparer les fonds a pour but de liquider les dettes de l’AI sans devoir les financer par la TVA ou par des cotisations salariales, mais on prend le risque de mettre l’AVS dans une situation intenable si les dettes de l’AI continuent de s’accumuler, ce qui justifierait alors des diminutions de prestations dans l’AVS et l’AI.

 

Se contenter de réserves pour l’AVS et l’AI représentant seulement 6 mois de financements ne permettrait pas de réagir politiquement autrement qu’en diminuant les prestations. Je rappelle que dans la 11ème révision bis, le CF voulait renoncer à adapter les rentes AVS à partir du moment où il y aurait moins de 70% du financement annuel de l’AVS dans le fonds. Alors pourquoi accepter maintenant de descendre à 50% ?

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