Lois fédérales sur l’armée et l’administration militaire

Entrée en matière

La version de cette loi, telle qu’elle a été présentée au Conseil national est une nette amélioration par rapport à ce qui avait été soumis à la procédure de consultation. On ne peut que s’en réjouir. En fait, on a tenu compte de la plupart des préoccupations qui avaient été exprimées dans le cadre de la procédure de consultation. On peut donc s’en réjouir.

Cette loi traite d’un sujet qui est important pour notre armée actuellement, c’est-à-dire son engagement à l’étranger. Il est vrai que nous n’avons actuellement que peu de soldats à l’étranger et que nous ne semblons pas avoir l’intention de changer cette pratique prochainement. Cependant, il vaut la peine de définir un cadre bien précis à notre action et de fixer les conditions dans lesquelles nos soldats peuvent être amenés à s’entraîner à l’étranger ou a mener des missions à l’étranger.

Notre armée doit résolument se préparer aux nouveaux risques que nous courons et abandonner la vision étriquée d’une action uniquement limitée à l’intérieur de nos frontières. Nous devons nous préparer à collaborer avec nos partenaires, à coordonner notre action avec eux, à intervenir parfois à l’étranger dans le cadre de missions pour le maintien et la promotion de la paix. Nous devons même imaginer aussi que nous pourrions être amenés à intervenir plus souvent pour maintenir la paix et la sécurité en Europe, voire dans d’autres pays, en Afrique par exemple, où notre action pourrait être particulièrement appréciée du fait de notre neutralité, de notre savoir-faire et de notre passé non colonial. Les besoins dans ce domaine sont considérables.

Si nous avons cette ambition de jouer un rôle de promotion de la paix et de la sécurité et que nous voulons que d’autres puissent profiter de notre savoir-faire dans ce domaine, nous devons bien sûr être ouverts à l’idée de nous entraîner à l’étranger, d’apprendre aussi de nos partenaires, mais bien sûr, tout cela doit être limité aux actions de promotion et de maintien de la paix et de la sécurité et ne doit pas s’étendre à des actions de défense au sens traditionnel du terme, à des batailles de chars par exemple. Nous aurons l’occasion d’en reparler lors de la discussion de détail.

Je veux une armée performante, efficace, prête à remplir les missions que nous voulons lui confier. Quelles sont ces missions ? Vous vous en doutez, pour moi, ce sont des missions de maintien de la paix et de la sécurité à l’intérieur de notre territoire, mais aussi dans les pays qui vivent des périodes de troubles en Europe ou ailleurs dans le monde, et à qui nous pouvons apporter une aide à la stabilisation, au renforcement des institutions démocratiques et au retour de la démocratie en général.

Il n’est plus utile aujourd’hui de se préparer à une invasion de notre territoire, ce n’est pas réaliste. Les menaces territoriales ont laissé la place à d’autres types de menaces, beaucoup plus générales, beaucoup plus diffuses, des menaces qui se moquent des frontières et des territoires. C’est le terrorisme, la criminalité organisée et peut-être également de nouvelles menaces comme le changement climatique, la crise énergétique ou le manque d’eau et de nourriture au niveau mondial, qui pourraient avoir des répercussions importantes dans notre pays. C’est ça les nouvelles menaces. C’est à faire face à cela que nous devons nous préparer.

C’est une optique complètement différente. Ce sont des menaces qui n’ont rien à voir avec les questions de défense traditionnelle. On ne peut entraîner une armée à répondre à des menaces contre son territoire, comme au 20ème siècle, alors que nous vivons dans un monde globalisé où nous sommes tous interconnectés. Nous devons nous préparer aux dangers qui nous menacent réellement. Nous ne sommes plus en période de guerre froide. Nous n’avons plus d’ennemis à l’est. L’Europe est aujourd’hui unie. Si nous devions être menacés, nous le serions avec l’ensemble de l’Europe et nous devrions être coordonnés avec elle. En principe, nous devons nous préparer à réagir à des attaques asymétriques et à des ennemis mal déterminés et très mobiles. Si les menaces traversent facilement les frontières, il faut que notre armée soit capable de tenir compte de cet élément. Nous ne pourrons assurer notre sécurité qu’en regardant bien au-delà de nos frontières, en coordonnant notre action avec nos partenaires européens, en travaillant à la promotion de la paix au niveau international, en travaillant quelquefois bien loin de chez nous. C’est la raison pour laquelle nous vous avons prié de ne pas classer la motion qui prévoit une augmentation de notre présence militaire à l’étranger pour maintenir la paix dans les zones de conflits potentiels

Si nous voulons continuer d’avoir une armée, alors il faut qu’elle soit utile et pour qu’elle le soit, il faut un changement complet de paradigme. Cette réforme est déjà en bonne voie. Nous avons fait un grand bout de chemin. Mais nous avons encore un bout de chemin à faire. Cette loi va dans la bonne direction.

Mais si nous voulons répondre aux menaces actuelles, il ne faut pas seulement une augmentation de notre engagement à l’étranger, il faut aussi une diminution de notre armée dans son ensemble. Une armée plus modeste, mais une action mieux ciblée, mieux menée.

Cela veut dire aussi moins de soldats, un système de recrutement plus sélectif, mais évidemment toujours des soldats de milice, je ne veux pas d’une armée professionnelle, mais seulement un plus grand professionnalisme, un accroissement du niveau de compétences des professionnels, le maintien d’une certaine flexibilité des effectifs et le maintien des compétences professionnelles nécessaires, autant chez les professionnels que chez les miliciens.

La crédibilité de l’armée est à ce prix. Je crois même qu’une telle armée aurait le soutien de la population et qu’elle retrouverait sa popularité, car toute la population comprendrait ses missions, s’il s’agit de maintien de la souveraineté de la Suisse, de la paix et de la sécurité dans le monde, et de l’intervention en cas de catastrophe naturelle ou autre. Et c’est à cela que devrait servir une armée du 21ème siècle.

Je vous propose d’entrer en matière sur ces deux révisions.

 

 

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