Indépendance dans la prescription et la remise de médicaments

Monsieur le Président,

Monsieur le Conseiller fédéral,

Chers Collègues,

Nous avons déjà eu de nombreuses interventions concernant ce sujet. Il faut dire qu’il est particulièrement choquant de voir ce qui se passe actuellement sur le marché. Les médecins sont incités par certaines entreprises pharmaceutiques à prescrire des médicaments d’un certain type ou en plus grande quantité que nécessaire, par des avantages financiers de toutes sortes. Or les médicaments ne sont pas des articles ordinaires. D’une part ils ont un effet sur la santé des patients et il faut donc que le médecin remette le bon médicament dans la bonne quantité s’il veut préserver la santé du patient. D’autre part, celui qui prescrit, celui qui consomme  et celui qui paie sont différents. Nous ne devons pas accepter une augmentation inutile des coûts de la santé, due à des prescriptions encouragées par des avantages directs remis au médecin.

Cette proposition du groupe PDC propose une modification de la LAMal. C’est une mesure utile, mais non suffisante. Notre principal problème, dans ce domaine, c’est la Loi sur les produits thérapeutiques, et en particulier, son article 33.

L’article 33 LPTh est un article anticorruption, mais en matière de corruption, il n’y a pas que le problème du choix du médicament, mais il faut aussi parler de la quantité de médicaments que l’on prescrit. L’article 33 doit aussi être révisé, parce qu’il ne permet pas de régler le problème de la corruption par des incitations ne venant pas du fabricant, mais d’intermédiaires ou d’autres fournisseurs de médicaments, et qu’il ne permet vraisemblablement pas non plus de régler la question de l’incitation à prescrire une quantité de médicaments plus importante que nécessaire.

Dans le cas d’école que présente la pharmacie « Zur Rose », qui est une sorte de grossiste en pharmacie avec envoi postal, le médecin actionnaire est intéressé au chiffre d’affaires. Il reçoit Fr. 5.- par position de prescription qu’il envoie à Zur Rose, qui ensuite envoie les médicaments au patient par la poste. Donc plus le médecin prescrit, et convainc le patient de passer par ce canal, plus il gagne d’argent! En Suisse romande, ce type de pratique est interdit par les lois sanitaires cantonales, mais avec la Loi sur le marché intérieur, les lois cantonales pourraient être remises en cause.

Dans toute cette réflexion il y a encore un point noir, c’est que les intermédiaires et grossistes n’ont aucun devoir de transparence et de répercussion des rabais, ni dans le LPth, ni dans la LAMal.

La CRASS s’est aussi préoccupée de cette question et nous a fait parvenir sa prise de position. Elle veut une réglementation claire et applicable des influences autorisées et proscrites sur les personnes habilitées à prescrire ou à remettre des médicaments. Elle propose des solutions légales pour que les personnes habilitées à prescrire puissent prendre leurs décisions en l’absence d’influences économiques, pour que les personnes habilitées à remettre des médicaments puissent solliciter et obtenir des rabais et avantages sous certaines conditions, qui doivent être parfaitement claires et pour que les accords entre personnes qui prescrivent et qui fournissent les prestations prescrites ayant pour but de s’accorder des avantages matériels réciproques puissent être interdits.

Ce que nous devons atteindre est simple :

1. garantir que le médecin prescrive sans y être poussé par l’intérêt,

2. qu’il prescrive sans être poussé par l’intérêt à prescrire un médicament plutôt qu’un autre

3. qu’il prescrive sans avoir intérêt à atteindre un volume ou un chiffre d’affaires auprès d’un fournisseur.

Si je reprends les explications des cantons romands, je peux ajouter que les personnes autorisées à prescrire doivent pouvoir le faire en toute indépendance, sans trouver un avantage à prescrire un médicament plutôt que rien, un médicament plutôt qu’un autre ou plusieurs médicaments plutôt qu’un seul. Les personnes habilitées à remettre des médicaments peuvent obtenir des rabais pour autant que les avantages soient octroyés de manière totalement transparente et soient répercutés entièrement sur la facture finale que reçoit le payeur ou en tout cas négociés en toute transparence.

Les cantons romands tiennent à ce que l’on favorise cette bonne pratique et à ce que l’on modifie l’article 33 LPTh pour mettre fin à ces  pratiques.

La motion du PDC va dans la bonne direction, c’est la raison pour laquelle je vous propose de l’adopter.

Contrairement à ce que répond le Conseil fédéral, à mon avis, le problème n’est pas réglé et il faut que nous précisions l’art. 33 LPTh pour que nous puissions aussi lutter contre les incitations liées à la quantité. A ma connaissance, Swissmedic ne reconnaît pas cette question de l’incitation à la quantité.  Or c’est ce point qui est un de ceux qui posent le plus de problèmes aujourd’hui.  Il faudra certainement y revenir.

En conclusion, Chers Collègues, je vous propose d’adopter cette motion.

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