Loi fédérale sur la radio-télévision

L’accord sur les médias a une certaine importance pour notre pays, en particulier en ce qui concerne la diffusion des films suisses. Le marché suisse est très petit et le fait de pouvoir donner à nos cinéastes des possibilités de se faire connaître à l’étranger est important pour l’attractivité du cinéma suisse pour les réalisateurs et les producteurs suisses en particulier. C’est peut-être une possibilité d’éviter qu’ils n’aillent tous à l’étranger.

Négocier avec l’UE n’est pas toujours facile. Ca devient une grande machine et forcément, plus c’est grand, moins c’est souple. En outre, nous avons aussi quelques différends avec l’UE, en ce qui concerne la fiscalité et on peut penser que l’UE n’a pas tous les jours envie de nous faire des cadeaux. En plus, la différence de taille avec l’UE est de plus en plus grande, à mesure que l’UE s’agrandit et le poids de la Suisse diminue à la même vitesse et dans les mêmes proportions.

Notre engagement dans l’accord sur les médias nous rapporte beaucoup. Nous avons obtenu des aides considérables et c’est donc un bon investissement. La Suisse est au cinquième rang des bénéficiaires en matière d’aide à la distribution.

Nous n’avons donc pas trop le choix en matière de reprise de la directive européenne en matière de fenêtre publicitaire, qui dit que c’est le droit du pays émetteur qui s’applique. Cette question de l’application du droit du pays émetteur ou récepteur se pose d’ailleurs dans tous les domaines et il n’y a pas que dans la radio/TV que c’est problématique.

Et là on se retrouve en porte-à-faux avec la LRTV que nous avons votée il y a peu et qui prévoit l’interdiction de la publicité pour l’alcool, la politique et la religion. Ces règles s’appliquent actuellement aux fenêtres publicitaires destinées à la Suisse uniquement. Ce ne serait plus le cas et il y aurait donc discrimination entre les publicitaires suisses et étrangers.

Nous avons accepté le programme médias. Devrons-nous aussi accepter la modification de la LRTV ? Le Conseil fédéral a entrepris de négocier avec l’UE pour limiter les dégâts et les a en effet limités. Reste  la question des boissons faiblement alcoolisées. Il y a là des enjeux de santé publique et de protection de la jeunesse. Nous ne pouvons pas abandonner notre politique de prévention aussi facilement que ça, ni non plus la laisser détourner à cause d’un accord sur le cinéma.

Y a-t-il vraiment inégalité de traitement entre les publicitaires voisins et les nôtres. J’aimerais rappeler quand même que depuis le 5 janvier, il n’y a plus de publicité du tout sur les chaînes publiques françaises à partir de 20h, c’est-à-dire au moment où les taux d’audience sont les plus forts et il est prévu d’interdire totalement la pub sur les chaînes publiques dès 2012 (France 2, 3, 4, 5 et O). Il n’y aura donc plus de pub que sur TF1 et M6. Il est vrai que M6 a une fenêtre suisse, où il pourra encore y avoir des pub pour des alcools de moins de 1,2%, c’est très peu. Donc, je dirais que du point de vue concurrence avec la France, nous ne sommes pas prétérités. Il semble bien qu’avec le Tessin, il n’y a pas de risque direct non plus. Il n’y a guère que l’Allemagne qui soit plus permissive.

La modification de la LRTV ne se justifie pas et je vous propose donc de ne pas entrer en matière. J’ajoute que plutôt que de réviser la LRTV, nous devrions au contraire nous engager pour l’interdiction des pubs pour l’alcool sur les autres chaînes de télévision européenne. La publicité pour l’alcool a une influence, en particulier sur les jeunes et les jeunes regardent beaucoup la télévision, même les ados et les enfants sont concernés.  La recherche l’a démontré : plus on voit de pub, plus on a envie de boire de l’alcool. Selon les instituts spécialisés, la levée de l’interdiction de la pub induit une augmentation de la consommation d’alcool de 5 à 8%, en particulier chez les jeunes. Elle agit d’une manière particulièrement persuasive en jouant sur les émotions et le sentiment d’appartenance à un groupe des jeunes. La publicité et la vente d’alcool est interdite pour les jeunes. Les jeunes ont accès à la télévision en tout temps. La levée de cette interdiction n’est  donc pas acceptable.

La consommation d’alcool en Suisse est déjà problématique, non seulement par les habitudes, mais aussi par les nombreux excès ponctuels graves. Le Conseil fédéral a adopté le Programme National Alcool en juin 2008. Ce n’est pas le moment de faire un pas en arrière pour de simples questions de confort ! L’alcool coûte 6,5 milliards par an à la société, ce n’est pas un détail. Et la tendance générale de la société va vers un meilleur contrôle de la consommation d’alcool et un encouragement à une attitude responsable. On irait à contre-courant de ce qui se fait aujourd’hui, y compris de la part de l’OMS.

La pub saboterait les efforts qui sont faits pour donner aux jeunes une image de l’alcool problématique, et non pas cool… or les entreprises ont plus d’argent à mettre à disposition pour que ça paraisse cool que l’OFSP pour que ça paraisse pas cool !

On peut bien sûr adopter l’accord sur les médias, mais il ne faut pas entrer en matière sur une révision de la LRTV. Nous n’avons pas de raison de nous déjuger quelques mois à peine après que nous avons décidé de ne pas permettre la pub pour l’alcool à la TV.

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